Aperçu de l’Evercade

Evercade

Notre dernier banc d’essai remonte à un peu plus d’un an avec le Flip Grip mais, pour notre défense, un test du Neo·Geo Arcade Stick Pro que l’on espérait en début d’année ne nous a jamais été livré, et la sortie de la PC Engine mini prévue en mars a été repoussée chez nous… Et ironiquement, il a fallu qu’elle arrive hier, une semaine après l’Evercade ! Mais au moins, la portable de Blaze, un constructeur à la production inégale, a l’avantage de nous changer des mini machines habituelles ces dernières années… Car même si l’Evercade permet elle aussi de rejouer à des rééditions de classiques (mais pas que), c’est avant tout une console qui lit exclusivement des cartouches, à une époque où le dématérialisé se généralise. Son positionnement est ainsi un peu étrange, puisqu’il semble plutôt cibler les retrogamers attachés aux éditions physiques mais, d’un autre côté, les collectionneurs préfèrent souvent posséder les originaux. Cela dit, la portable bénéficie quoi qu’il en soit d’un atout objectif par rapport à la plupart des machines rétro : un tarif plutôt doux (70 € avec une cartouche), qui pose forcément question sur la qualité du produit toutefois. Or si les premiers retours évoqués dans notre tout premier live étaient plutôt encourageants, plusieurs problèmes avaient été signalés et on avait donc déjà hâte de voir s’ils avaient été réglés pour la sortie, elle aussi repoussée de quelques semaines par la pandémie…

Le déballage a débuté par une double surprise. D’un côté, la console est plus grande que ce que j’imaginais, plus large qu’une 3DS par exemple. Au moins, même si elle ne suit (décidément) pas la tendance du moment, elle tient bien dans les mains, et dispose de gros boutons bien que certains soient proches du bord (surtout A et B), ce qui causera peut-être des crampes à certains… Et d’un autre côté, les boîtes de jeux sont au contraire plus petites que « prévu » : même largeur qu’un boîtier Switch mais un peu moins haut. En revanche, elles sont au moins deux fois plus épaisses et même davantage qu’un boîtier de DVD, cartouches obligent… Ces dernières sont d’une bonne taille mais s’intègrent un peu trop parfaitement à la console ; j’ai vraiment cru que je n’arriverais jamais à insérer la première, et il vaut mieux avoir des ongles pour les retirer – d’où la vidéo ci-dessous pour montrer comment assouplir le port… Outre la cartouche, chaque boîte de jeu contient un joli manuel couleur, mais forcément concis avec en général une page par titre, puisqu’il s’agit de compilations. L’essentiel est là (même si les commandes sont parfois erronées comme on le verra) et on a même droit à quelques détails inattendus comme le nom des concepteurs de ces classiques. La boîte de la console contient elle-même un manuel en plusieurs langues, bien traduit mais un peu concis là encore : rien concernant les mises à jour de firmware sans doute non prévues. Le câble micro-USB est fourni (mais pas de prise murale ni de câble HDMI) ainsi qu’une cartouche – Namco Museum Collection 1 pour moi mais il existerait d’autres starter packs.

Cela fait tellement longtemps qu’on n’a plus de port cartouche qu’il faut s’entraîner !

Concernant la portable elle-même, elle dispose d’une diode indiquant si elle est allumée ou en charge, mais pas de couleur (a priori, *) quand cette dernière est terminée… On peut toujours allumer la console, même sans cartouche, pour voir le niveau de batterie, mais c’est dommage. Sinon, comme on le disait plus haut, la prise en main est agréable, et le pad  directionnel façon Mega Drive, étrangement surélevé (on peut même le « cliquer » comme un stick analogique), est plutôt efficace en pratique. On avait évoqué à la fin de ce live notre amour pour les cliquetis des boutons de tranche, mais ceux de face n’en sont pas moins convaincants. En revanche, leur disposition façon Dreamcast/Xbox se révèle malencontreuse, ne serait-ce pour le nombre de jeux qui proviennent de la NES et de la Super Nintendo qui suivent la convention inverse (cf. notre édito sur le sujet). Cela a d’ailleurs perturbé Blaze lui-même puisque les commandes de certains titres (par exemple Xevious (1982) et Battle Cars (1993) pour Namco Museum Collection 1) sont erronées dans les manuels, sans doute réalisés par des gens qui ont consulté ceux d’origine sans réaliser que la position des boutons était différente !… Que les lettres ne correspondent pas, ce n’est pas gênant et même compréhensible pour une machine qui émule plusieurs consoles, mais les contrôles sont aussi inversés et, même si c’est rarement gênant, ça peut l’être pour certains jeux comme ceux de Technōs où la position des boutons correspond à la direction des attaques !

Mais c’est encore pire pour les jeux Mega Drive, et c’est d’autant plus dommage que l’émulation de la console de SEGA est la meilleure sur une portable d’après Digital Foundry, car on utilise A, B et Y plutôt que X, A et B. Enfin ça, c’était avant la mise à jour de firmware. Mais contrairement à ce que j’avais compris et donc laissé penser dans cet article, celle-ci ne permet pas de configurer les contrôles une bonne fois pour toutes ; elle se contente de restituer, dans les cas les plus gênants (près de 80 jeux tout de même), la configuration d’origine – qui ne correspond toujours pas à celle du manuel parfois, comme dans le cas de Battle Cars (1993) ou Super Double Dragon (1992, cartouche Technōs Collection 1). De manière générale, les options sont plutôt chiches… On a au moins droit à des des savestates, c’est l’essentiel, mais l’interface est austère et l’on choisit les emplacements à l’aveugle. Et il ne faut pas se tromper car il y en a plus de cent par jeu – je n’ai pas osé scroller jusqu’à 999 pour vérifier ! On ne court en tout cas aucun risque d’effacer la sauvegarde d’un autre titre mais, si on veut en utiliser plusieurs par jeu, on aura intérêt à prendre des notes… Sinon, outre le choix de la langue, il n’y a que deux réglages d’image et il vaut mieux laisser le 4/3 par défaut. Mais c’est bien dommage d’avoir pris un écran 16/9 qui prend tant de place et qui n’est exploité que par le menu général (et encore). À ce propos, l’Evercade peut être connectée à un téléviseur via un câble hélas non fourni d’autant qu’il faut à nouveau, comme pour la Neo·Geo Mini, une connectique mini-HDMI hélas pas si fréquente dans le commerce.

Evercade
Surtout ne pas renverser cette tasse…

La portabilité étant l’un des principaux attraits de la console, il n’est pas certain que « l’investissement » vaille le coup de toute façon, d’autant qu’aucun multijoueur n’est possible. Blaze Entertainement a évoqué plutôt la possibilité d’un nouveau modèle d’Evercade, pensé pour le multi et donc sans doute une version « de salon » mais tout dépendra du succès de l’originale probablement… Cela dit, la connexion avec un téléviseur a le mérite d’être là et fait le job. La bascule est immédiate, bien que l’on ait droit de nouveau au logo de démarrage et, si l’interface est particulièrement laide en 720p (jaquettes, captures d’écran, boutons), c’est heureusement d’un bien meilleur niveau en jeu. Sur NES, on a vraiment l’impression de jouer avec une console d’origine, clignotements et bugs d’affichage compris, mais l’image des titres Super Nintendo nous a semblé moins fine que ce que l’on peut avoir sur Switch par exemple, tout en restant acceptable. Le son est en revanche autrement meilleur que celui qui sort des enceintes de la portable – on conseille les écouteurs en faisant attention à la saute désagréable au lancement d’un jeu – du moins quand il marche ! C’est en effet le troisième problème soulevé par les tests, et que nous avons nous-mêmes constaté sur Super Double Dragon (1992) ; le titre démarre sans son, tout simplement. L’équipe travaille sur une nouvelle mise à jour du firmware mais a donné une technique qui fonctionne en attendant : sauvegarder, quitter, relancer et charger sa partie.

Espérons que la prochaine mise à jour corrigera un autre désagrément en matière de son : les bruits de l’interface. Agressifs et empirés par un niveau sonore très élevé au premier démarrage, ils ne peuvent hélas pas être coupés, puisque l’option qui permet de désactiver l’audio depuis le menu principal coupe le son dans son intégralité. En tout cas, on salue le suivi de Blaze Entertainement qui semble avoir des plans sur le long terme, avec d’ores et déjà (au moins) cinq nouvelles cartouches d’ici la fin de l’année, et l’envie de dépasser la cinquantaine en trois ans. Et c’est d’autant plus important que l’intérêt de l’Evercade repose beaucoup sur cet avenir ; l’offre actuelle est honnête, mais ces compilations sont par nature inégales, et les éditeurs qui ont prêté leurs licences sont surtout les « suspects habituels » que sont Atari, Data East, Interplay ou Technōs. En revanche, même s’il y a à boire et à manger encore une fois, les cartouches de jeux homebrew Mega Cat Studios et d’inédits Piko Interactive sont nettement plus excitantes… Mieux encore, cet été doivent arriver deux compilations de titres peu réédités sur Lynx, et un alléchant bundle Xeno Crisis & Tanglewood Dual Game Cartridge ; il ne réunit certes que deux jeux au tarif habituel de 19,99 €, mais leurs éditions physiques sur Mega Drive coûtent 60 € chacune !

Xeno Crisis & Tanglewood Dual Game Cartridge (Evercade)

L’Evercade a donc clairement une cart(ouch)e à jouer en matière de homebrew car, dans le domaine des rééditions, il va falloir proposer des titres un peu moins courants (ou alors qui n’aient pas été oubliés pour de bonnes raisons). En particulier, l’une des grosses déceptions provient du fait que les jeux d’arcade sont toujours représentés par des portages NES, Mega Drive ou Super Nintendo – au moins ils ne s’en sont pas cachés bien longtemps, contrairement à AtGames. Là encore, Blaze Entertainement promet l’émulation de l’arcade pour l’année prochaine, et on peut comprendre que ce soit un peu plus compliqué, tant pour des questions de hardware plus puissant et donc plus difficile à émuler convenablement, que de format d’écran souvent vertical dans les salles obscures… Dans tous les cas, il ne faudrait pas que la portable se repose sur sa seule particularité de snober le dématérialisé, un choix qui peut séduire les derniers retrogamers réfractaires, certes, mais cet « avantage » va forcément s’étioler avec le temps et l’évolution des habitudes. Et ce serait bien dommage car, comme on a essayé de vous le faire comprendre, la machine a d’autres atouts. Néanmoins, et même si les perspectives évoquées plus haut seront inévitablement liées à son succès, on vous conseille de patienter un peu avant de vous jeter sur l’Evercade. À moins qu’il y ait déjà deux ou trois cartouches parmi les dix disponibles qui vous font vraiment de l’œil, mieux vaut attendre encore d’en savoir un peu plus sur les jeux à venir.

Un grand merci à tous ceux qui nous soutiennent sur Tipeee.

Les cartouches déjà disponibles et à venir en 2020 :

  1. Atari Collection 1
  2. Namco Museum Collection 1
  3. Data East Collection 1
  4. Interplay Collection 1
  5. Atari Collection 2
  6. Namco Museum Collection 2
  7. Interplay Collection 2
  8. Mega Cat Studios Collection 1
  9. Piko Interactive Collection 1
  10. Technōs Collection 1
  11. Q3 2020 : Atari Lynx Collection 1
  12. Q3 2020 : Xeno Crisis & Tanglewood Dual Game Cartridge
  13. Q3 2020 : Atari Lynx Collection 2
  14. Q3 2020 : The Oliver Twins Collection
  15. Q3 2020 : ???

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