TEST : Freedom Planet

Freedom Planet (Windows, Mac OS X, Linux, Wii U)FREEDOM PLANET
Windows, Mac OS X, Linux, Wii U

Catégorie : plateformes
Joueurs : 1
Développeur : GalaxyTrail
Éditeur : GalaxyTrail
Date de sortie : 21/07/2014 (PC & Mac), 29/10/2015 (Wii U)
Prix : 14,09 € (GoG) / 14,99 € (Steam) /
13,99 € (eShop)
Site Officiel : [Freedom Planet]
(testé dans sa version Wii U)

S’il ne faut pas très longtemps pour comprendre que Freedom Planet est un hommage aux premiers épisodes de Sonic, il faut savoir que Stephen DiDuro en a débuté le développement comme un fangame situé dans l’univers du hérisson bleu, à la manière d’un Sonic: After the Sequel (2013) – dans lequel l’héroïne Lilac fait d’ailleurs une apparition ! Mais sentant qu’il se terrait dans une impasse, à essayer d’être à la hauteur d’un classique tout en bridant sa créativité, le New-Yorkais a décidé de s’émanciper un peu de son modèle encombrant, et a demandé l’autorisation à l’illustrateur chinois Ziyo Ling « d’emprunter » trois de ses personnages aperçus sur DeviantArt. DiDuro est même allé plus loin en modifiant Lilac, à l’origine conçu comme un hérisson, en dragon. Le projet a ainsi acquis une atmosphère asiatique qui fait son originalité, mais qui accentue aussi son côté « contrefaçon made in Taïwan » ! Développé au Danemark (!) à l’aide de ClickTeam Fusion, le jeu a pu aussi bénéficier d’une campagne Kickstarter, étant libéré d’éventuels problèmes de droits. Et les contributeurs ont d’ailleurs encouragé le studio GalaxyTrail à s’éloigner de Sonic, même si l’hommage reste évident…

Déjà sur le plan visuel, on retrouve un univers similaire et la réalisation évoque une Mega Drive boostée aux hormones, avec des sprites énormes et nombreux. Le tout bouge à merveille, en dehors de gros ralentissements lorsque les boss meurent – à se demander si ce n’est pas volontaire ! Les décors façon 3D précalculée mal compressée feront davantage débat, mais il faut avouer que cela ressemble pas mal à ce que l’on trouvait sur la console en fin de vie avec des jeux comme Vectorman… Les sonorités font d’époque mais les musiques ne relèvent pas de la chiptune malgré leur parfum rétro ; on dirait plutôt de (bonnes) pistes CD de la période. Le plus anachronique vient clairement du doublage des dialogues, qui jurent d’autant plus avec le reste que le mixage n’est pas impeccable. L’interprétation est bonne, du moins conforme à la tonalité anime recherchée, mais les (nombreuses) cinématiques ne sont pas captivantes pour autant, et refroidiront sans doute ceux qui espéraient une expérience plus old school. Du point de vue du gameplay, les fans de Sonic ne seront pas non plus dépaysés initialement, avec un level design qui reprend les éléments incontournables de la série, jusqu’aux loopings et autres ressorts !

Le Dragon Boost permet de foncer en diagonale et de rebondir contre les murs !

Le Dragon Boost permet de foncer en diagonale et de rebondir contre les murs !

Mais là où le hérisson bleu est connu pour n’avoir besoin que d’un seul bouton pour tout faire, on utilise ici trois touches, soit bien entendu autant que sur une manette Mega Drive ! Outre le bouton de saut, ou trouvera un bouton d’attaque pour frapper les ennemis et les interrupteurs, et un bouton de capacité spéciale dont la fonction dépend du personnage. Avec la dragonne Lilac, il permet d’activer le Dragon Boost qui permet de foncer à la manière du Spin Dash de Sonic, à la différence (importante) près qu’il peut être exécuté en diagonale et dans les airs ! Il nécessite toutefois d’avoir sa jauge de pouvoir remplie, ce qui le rend un peu pénible dans la pratique, surtout si on a eu le malheur de rappuyer sur le bouton de saut et d’effectuer ainsi le Dragon Cyclone, un double saut offensif qui consomme un peu de jauge. Celui-ci est remplacé chez Carol par un plongeon que l’on peut combiner avec une attaque, et elle compense l’absence de double saut par la possibilité d’escalader les parois via un saut mural, et par la possibilité de bondir d’une dalle rouge à l’autre en maintenant « haut » avant de sauter. De plus, Carol est privée du Dragon Boost qu’elle remplace par sa moto, mais son utilisation est très différente…

On la « gagne » en ramassant un jerrican et on ne la perd qu’après avoir été touché un certain nombre de fois. Cela ne modifie néanmoins pas totalement la prise en main puisqu’on peut continuer d’escalader les murs… et même d’emprunter les échelles ! On ne peut en revanche pas en dire autant du troisième personnage jouable, Milla, qui change radicalement l’expérience : aucune jauge de pouvoir, une jauge de points de vie plus courte mais qui se régénère, elle est d’emblée moins offensive puisque son attaque est remplacée par la possibilité de matérialiser (lentement) un cube qu’elle peut envoyer sur les ennemis. À la limite, on utilisera plutôt son bouclier qui permet aussi d’attaquer. Côté mobilité, elle peut utiliser ses oreilles pour s’envoler et planer un court instant, plutôt à la manière de Yoshi que de Tails d’ailleurs. Du coup, on regretterait presque qu’elle ne dispose que d’un seul niveau inédit, tant le reste de l’aventure (notamment les boss) semble peu adapté. Et ce qui est dommage, c’est que beaucoup de ces mécaniques, comme les dalles rouges de Carol ou les blocs de Milla, se découvrent le plus souvent par hasard, le manuel électronique du jeu ne détaillant même pas les commandes !

Ces cartes disséminées dans les niveaux débloquent des musiques, voix et artworks

Ces cartes disséminées dans les niveaux débloquent des musiques, voix et artworks dans la galerie du jeu.

Il est donc tout aussi difficile de saisir le rôle des nombreux objets à collecter… On dispose par exemple d’un compteur de deux-cents cristaux bleus qui diminue (!) quand on en ramasse, et c’est donc quand il arrive à zéro qu’on gagne une vie supplémentaire. Les cristaux rouge, eux, redonnent des points de vie mais comptent comme des cristaux bleus si on a son énergie au maximum ! À ces items de base s’ajoutent des orbes étranges, souvent par trois dans les coffres ou cédés par les ennemis. Bien qu’il y en ait de différents types, ils sont comptabilisés de la même manière en fin de niveau et donnent ainsi accès à une salle bonus où l’on obtient des récompenses en jetant un dé façon Gunstar Heroes… On aurait quand même préféré un vrai stage bonus ! On trouve également des vies supplémentaires enfermées dans des cages, et des gros cristaux à détruire pour obtenir une invincibilité à la Sonic, ou différents boucliers colorés qui évoquent la série de SEGA : l’un permet de respirer sous l’eau, l’autre d’attirer les bonus, etc. Il y a aussi des cartes à collectionner qui débloquent des éléments dans la galerie du jeu, et enfin les symboles yin & yang, ramassés plusieurs fois et dont je n’ai toujours pas compris le rôle…

Bref, c’est assez riche et même un peu trop, du moins perturbant sans la moindre explication… Au moins, les puristes de Sonic devraient aimer l’accent mis sur l’exploration, et le fait que le level design limite les passages de vitesse qui s’achèvent sur un empalement ! En revanche, ils seront sans doute refroidis par la physique moins rigoureuse, rappelant davantage les épisodes récents que ceux de la Mega Drive ; on peut ainsi courir le long d’une pente verticale sans élan… pour hélas souvent retomber une fois en haut, faute de savoir vers où se diriger quand on a la tête en bas, ou dans quelle direction va nous envoyer un saut depuis un mur ! Et courir vers un ressort ne donne pas non plus le résultat escompté, même si on lâche la direction… Ce qu’on retrouve plutôt du hérisson bleu, hélas, c’est son côté « savonnette » quand il est transformé en Super Sonic, et il est parfois là aussi très fastidieux d’atterrir sur une petite plateforme. De toute façon, il n’est pas certain que Freedom Planet s’adresse aux fans de la première heure, compte tenu de la présence de « shitty friends » – surnom donné aux copains de Sonic, toujours plus nombreux et irritants… Surtout qu’ici, les cinématiques bien généreuses leur donnent la part belle !

Freedom Planet, c'est aussi d'interminables dialogues

Freedom Planet, c’est aussi d’interminables dialogues entre personnages anthropomorphes…

C’est d’ailleurs sans doute sur ce point que Freedom Planet diffère le plus des épisodes 16-bit de Sonic : de nombreuses séquences de dialogues que l’on peut heureusement interrompre, du moins une par une – il peut y en avoir pas loin d’une dizaine entre certains niveaux ! Inutilement compliqué, le scénario n’a en plus rien d’original et verse même souvent dans la caricature avec son humour manga, son évocation balourde des aléas de l’amitié, et ses moments sombres très « émo » comme cette séquence de torture digne d’une mauvaise fanfiction dédiée au hérisson bleu… On retrouve en plus toute la panoplie des compagnons agaçants, avec Carol la « traîne » (« tail » en anglais…) de Lilac, enjouée et débordante d’énergie, et Milla la chienne (un basset) naïve et kawaii. On a même droit au geek tourmenté, Torque, et au rebelle ténébreux, Spade… Cet univers asiatique à la sauce occidentale – il y a surtout des références à la culture chinoise mais nos héros raffolent des sushis – ne sera pas du goût du tous, même si cela n’a pas d’impact heureusement sur le gameplay. Et ceux qui ne voudront même pas prendre le temps de zapper les cinématiques en mode Adventure pourront se tourner vers le mode Classic

La campagne solo se décline en effet en deux variantes, sachant que le mode Classic ne se différencie donc que par l’absence de cinématiques et la possibilité de jouer Milla. Celle-ci est également disponible dans le mode Time Attack, qui offre une « académie » de dix-huit petits parcours supplémentaires dans lesquels il faut détruire toutes les cibles le plus vite possible ; il est d’ailleurs dommage qu’il n’y ait pas de « par » à battre pour chacun d’eux. Outre de bien maigres options, on trouve enfin la galerie réunissant les cartes trouvées dans les niveaux, mais aussi une liste de succès. Précisons en passant que tout est en anglais, aussi bien les doublages que les sous-titres et menus, hélas… En tout cas, le titre offre une durée de vie plutôt bonne pour le genre ; il m’aura fallu cinq heures de jeux « effectives » (sans les cinématiques) pour finir l’aventure avec Lilac, et je ne sais pas si cela compte mes quatre-vingts vies perdues… En difficulté « normale », cela reste assez facile à l’exception de plusieurs boss à la Treasure, bien coriaces. C’est d’ailleurs assez inégal de ce point de vue, car certains sont accompagnés de cristaux rouges, et d’autres non. Le boss du stage 4 est le premier à m’avoir posé problème…

Contre certains boss, vos amis vous donnent un coup de main...

Contre certains boss, vos amis vous donnent un coup de main…

Par « problème », je veux dire que je ne compte plus le nombre de fois où j’ai épuisé presque toutes mes vies, pour battre enfin un boss alors que je n’avais plus d’énergie – surtout si comme moi vos performances sont décuplées quand vous êtes sur le point de mourir… Heureusement, si les cristaux rouges sont distribués de manière inégale, les vies le sont assez généreusement. Mais celles-ci n’ont à vrai dire pas grand intérêt car si vous les perdez toutes – comme ça m’est arrivé la première fois au demi-boss de l’avant-dernier niveau – les continues sont infinis et vous reprenez aussi au dernier checkpoint… En revanche, il est possible de changer le niveau de difficulté (mais pas le personnage) au cours de l’aventure, mais il faudra quitter la partie et donc reprendre le niveau au début ! Les stages étant quasiment tous scindés en deux parties très différentes et assez longues, on peut hélas être tenté d’arrêter à mi-parcours… Chacune des deux moitiés du niveau 2 nous emmène en outre à tour de rôle dans deux directions différentes pour activer des interrupteurs afin de débloquer une double porte… Pour faire court, le level design est assez complexe, parfois laborieux et mise bien plus sur l’exploration qu’un Sonic.

C’est aussi ce qui garantit la durée de vie du jeu, mais compte tenu de la taille des niveaux et du fait qu’il n’est pas toujours possible de rebrousser chemin, on peut se demander s’il n’est pas un peu fastidieux de trouver tous les secrets de chaque stage. D’autant que, judicieusement, certaines cartes ne peuvent être ramassées qu’avec l’un des trois personnages, ou du moins plus facilement par celui-ci. Il serait donc simpliste de dire que Freedom Planet ne plaira qu’aux fans du hérisson bleu, ou même de prétendre (comme je l’ai lu) qu’il ressemble « à un Sonic développé par Treasure ». Par exemple, on retrouvera du studio mythique le côté « jeu qui n’en finit pas de finir » avec moult niveaux ultimes et des boss qui multiplient les formes encore plus « finales » que les précédentes… Mais Freedom Planet manque parfois de la précision qui caractérise ses modèles, avec une physique perfectible et par exemple un Dragon Boost dont la direction est parfois bien difficile à prévoir. Ce côté imprévisible fait que certains passages, typiquement les boss, peuvent sembler reposer en partie sur la chance… Heureusement, cela marche dans les deux sens, et réussir de justesse après de nombreux échecs est très gratifiant.

Verdict : Loin du bête plagiat, Freedom Planet est un bel hommage à Sonic et à d’autres classiques de la Mega Drive, même s’il n’en reprend pas que les meilleurs aspects…

80hbpm

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