ULTRACORE
Mega Drive, PlayStation 4, Vita, Switch
Catégorie : run and gun
Joueurs : 1
Développeur : Digital Illusions/Strictly Limited Games
Éditeur : ININ Games
Date de sortie : 22/06/2019 (Mega Drive), 23/06/2020 (Switch), 07/2020 (PS4/Vita)
Prix : 19,99 € (dématérialisé)
Site Officiel : https://ultracore.strictlylimitedgames.com/
(testé sur Mega Sg)
Avant d’être l’artisan des principaux blockbusters d’Electronic Arts, le studio suédois DICE s’est fait connaître sur Amiga en tant que Digital Illusions CE, signant des classiques comme Pinball Dreams (1992). Débuté sur le micro-ordinateur puis migré sur Mega Drive (avec une version Mega CD envisagée mais non développée), le jeu connu à l’époque sous le nom de Hardcore a été annulé alors qu’il était presque terminé, suite au rachat de son éditeur Psygnosis par Sony en 1993. Des années plus tard, il a été bouclé par Strictly Limited Games avec la bénédiction des développeurs d’origine et est sorti en exclusivité intégré à la Mega Sg, avant de faire l’objet d’éditions physiques sur Mega Drive puis sur les consoles actuelles de Sony et Nintendo. Précisons cependant d’emblée que la version d’Ultracore sur plateformes modernes n’apporte hélas pas grand-chose, hormis un contrôle à deux sticks qui ne rend pas l’aventure beaucoup plus facile paraît-il, et le choix entre la bande originale d’époque et une moderne, tout aussi réussie. Mais aussi insensé que cela puisse paraître, il n’y a pas de sauvegardes et il faudra donc entrer des mots de passe de seize caractères en faisant défiler les lettres une par une, à l’ancienne. C’est heureusement assez rapide cela dit, mais il faudra prendre garde à ne pas confondre les X et les K par exemple, car la moindre erreur oblige à réécrire le code en entier… L’expérience sera donc vintage jusqu’au bout.
Sur Mega Drive, les options sont encore plus spartiates ; les meilleurs scores ne semblent pas mémorisés, et les réglages de son se limitent à activer les musiques et/ou les effets sonores… Côté contrôles, on dispose de quatre combinaisons de boutons pour chacun des deux modes, 8-way ou free. Outre le fait que dans le premier on tire dans l’une des huit directions appuyées, comme son nom l’indique, alors que dans l’autre on infléchit la direction avec haut et bas, il y a une autre différence subtile mais importante. En free, si on commence par maintenir le bouton de tir, le personnage reste immobile et peut alors tirer tout autour de lui. Si à l’inverse on commence par se déplacer, maintenir ensuite le tir permet de le faire dans la même direction tout en reculant, sautant, se baissant, etc. Cela demande peut-être plus de temps pour s’y faire, mais cela devient vite très naturel. Cependant, ces deux possibilités existent aussi dans le mode 8-way, mais on passe manuellement de l’une à l’autre en appuyant sur le bouton d’action (A par défaut) tout en maintenant le bouton de tir. Mais quelle que soit votre préférence, pensez bien à la régler à chaque partie car elle n’est pas mémorisée dans le mot de passe – au moins, on peut en changer.
Ultracore n’a en tout cas pas besoin d’imiter un style d’antan comme le ferait un jeu homebrew tel que Gunlord pour avoir l’air rétro. Il ressemble à ce qu’il est, un jeu de 1993 développé par un studio européen, un run and gun évoquant forcément Turrican mais avec une palette argent et or à la Bitmap Brothers. Et on sent rapidement que ses créateurs viennent de la demoscene, avec ses textes de cinématiques qui se retournent sans raison et ses meilleurs scores qui s’affichent avec une distorsion rendant la saisie inutilement laborieuse (du moins si on est mal classé)… Il en est de même pour le gameplay de ce jeu qui aurait sans doute été qualifié abusivement par la presse française comme de « l’arcade/aventure » à l’époque. Parce que, d’un côté, l’aspect exploration est assez poussé avec un level design souvent labyrinthique, des clés à trouver, des terminaux et interrupteurs à actionner, etc. Cependant, il n’est hélas pas toujours possible de faire demi-tour après avoir passé une porte ou être tombé dans un trou, et on ne sait donc pas toujours si un chemin mène à la suite ou à un secret facultatif. Et, d’un autre côté, il est évident que Digital Illusions CE lorgnait sur les jeux d’arcade japonais comme la plupart de leurs contemporains.
On se retrouve ainsi avec des éléments comme des gros jetons tournoyant à collectionner tel un plombier moustachu, et qui rapportent une vie supplémentaire quand on en cumule cinquante – de même qu’on en gagnera aussi une tous les 50 000 points. Il y a aussi certains passages secrets qui apparaissent quasiment par magie quand on s’en approche, avec des cœurs pour reprendre de l’énergie. Et puis on est loin de la solitude d’un Metroid, avec des ennemis extrêmement nombreux. Il y en a dès le début de l’aventure de différents types, même si beaucoup se contentent un peu d’avancer vers vous et l’action se révèle hélas un peu répétitive. Mais il ne faut pas oublier que c’est une cartouche d’une capacité traditionnelle de huit mégabits – à comparer aux 120 Mb d’un Demons of Asteborg… On critiquera plutôt cette propension à multiplier les petits ennemis horripilants et difficiles à viser, et sur lesquels on finira souvent par rebondir de manière infernale (alors que cela sert à atteindre certaines zones surélevées). Et dès la deuxième partie du premier niveau, une nouvelle variété de moucherons encore plus pénibles apparait, surtout qu’ils sont moins visibles à l’instar de certaines tourelles trop discrètes au plafond, ou de ces robots plats qui vous foncent dessus trop vite pour vous laisser le temps de vous baisser et leur tirer dessus…
Et c’est dans ces moments où l’on essaie tant bien que mal de viser en diagonale une tourelle capable de se rétracter au plafond, alors qu’une nuée d’ennemis arrive de la gauche comme de la droite, qu’on se demande si les contrôles au double stick de la version émulée sur PlayStation et Switch ne serait pas plus efficace… Heureusement, les munitions de l’arme de base sont illimitées, et le compteur de l’interface touffue concerne en fait l’arme secondaire. On en trouve dans des mallettes sachant qu’on ne peut en porter qu’une à la fois, et qu’on la sélectionne avec le bouton X par défaut. On peut également ramasser des smart bombs mais, pour une raison qui m’échappe, je ne suis jamais parvenu à en utiliser – le bouton Z me fait sauter comme C ou Y. Enfin, une autre chose qui est limitée, là encore dans un style arcade pas forcément très pertinent, est le temps. À moins de fouiller les niveaux pour dénicher le moindre secret, il se révèle relativement suffisant d’autant que des bonus en redonnent mais, là où c’est vraiment vachard, c’est qu’une vie perdue autrement ne réinitialise hélas pas le chronomètre, et on peut donc en perdre deux d’affilée !
Cela dit, outre les jetons et le score, il y a aussi des vies (bien) cachées dans chaque niveau et, de manière générale, Ultracore regorge de secrets. Il suffit de jeter un œil à l’écran de fin de niveau (celui qui indique le mot de passe) pour constater tout ce que l’on a loupé… Il faut regarder attentivement les parois pour observer des murs friables, ce qui vous permettra aussi d’obtenir de temps à autre un bouclier fort utile puisqu’il vous rend temporairement invulnérable (aux tirs du moins). On est également tombé une seule fois sur une boutique permettant d’échanger ses jetons, et on aurait aimé que le concept soit un peu plus poussé d’autant qu’on ne peut pas y acheter de vies supplémentaires, hélas. Car ces dernières peuvent défiler à toute vitesse lors de certains passages, même si l’on réapparaît immédiatement au même endroit (ou juste avant le gouffre où l’on est tombé le cas échéant, bien entendu) quand on perd une vie. Chaque niveau comporte au moins une séquence (souvent de plateforme) pénible et malheureusement obligatoire et, comme perdre un crédit nous renvoie au début de la « zone » courante (au moins deux par niveau), on pourra être amené à les refaire et les tentatives suivantes paraitront en général plus faciles.
Et dans la mesure où l’on ne dispose que de trois crédits et que leur nombre est hélas mémorisé dans les mots de passe, on sera souvent tenté de tout recommencer depuis le début pour jouer mieux (et idéalement trouver d’autres secrets)… Ultracore repose de toute façon beaucoup trop sur des pièges inévitables la première fois, puisqu’il n’est par exemple pas possible de regarder vers le bas. Et même si un saut ne vous fait pas atterrir dans un trou ou sur un sol électrifié qui vous désintègre immédiatement, la chute pourra vous faire néanmoins perdre de l’énergie. Autant dire qu’il vous en faudra du temps pour finir ses cinq niveaux, un nombre qui peut sembler faible d’autant que les séquences en véhicules initialement prévues ne sont pas présentes, mais chaque stage est long, avec au moins deux boss à affronter. J’ai pour ma part fini par abandonner juste après le premier du troisième niveau, situé entre deux phases de plateforme horribles, en particulier la seconde qui ne repose pas tant sur le timing que sur le bon vouloir des collisions. Et sachant qu’en cas de crédit perdu, on recommence avant la première et non après le boss…
Le genre de choses qui nous rappelle que l’on n’a pas affaire à un homebrew, mais bien à une production d’époque sur Mega Drive. Si le jeu de Digital Illusions CE était sorti en 1994, on s’en souviendrait sans doute comme d’un classique, certes difficile, mais pas plus que beaucoup de titres d’alors. Mais aujourd’hui, si l’on sait gré à Strictly Limited Games de l’avoir préservé, Ultracore fait face à une concurrence bien plus rude et il aurait sans doute été judicieux de lui ajouter quelques options de « Quality of Life » comme on les appelle de nos jours (au hasard un système de sauvegarde), ne serait-ce que dans la version émulée sur plateformes modernes.
Verdict : Run and gun typique de son origine (l’Europe) et de son époque (le début des années 1990), Ultracore nous replonge dans un temps où les jeux étaient aussi charmants que cruels…
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