TEST : Owlboy

Owlboy (Windows)OWLBOY
Windows
Catégorie : action/aventure
Joueurs : 1
Développeur : D-Pad Studio
Éditeur : D-Pad Studio
Date de sortie : 01/11/2016
Prix : 22,99 €
Site Officiel :
http://www.owlboygame.com/

À sa sortie le 1er novembre, on avait presque du mal à croire qu’Owlboy soit réellement disponible… Sur le Mag, cela faisait plus de cinq ans et demi qu’on avait écrit notre premier article sur le jeu de D-Pad Studio (Savant Ascent), alors qu’il devait arriver courant 2011. Au final, il aura fallu près de dix ans pour concrétiser ce Metroivania à la réalisation ambitieuse, mais il est important de préciser que l’équipe derrière est ridiculement réduite : une demi-douzaine de personnes, musicien et sound designer compris, dont une seule aux graphismes – qui en est aussi le scénariste et le game designer ! Il est donc superflu de rappeler que le titre était attendu au tournant, et on ne peut pas dire qu’il déçoive sur le plan visuel et sonore. Le pixelart a le mérite d’être « orthodoxe » sans pour autant imiter les restrictions d’une machine en particulier, mais il faudrait au moins une Neo·Geo ou une Saturn pour atteindre ce niveau ; les animations incroyablement soignées ne dépareilleraient pas trop dans un Metal Slug d’ailleurs… Le jeu se permet même un luxe de détails extraordinaire d’autant qu’il semble parfois inutile en termes de gameplay, comme un magnifique cycle jour/nuit qui rend l’exploration encore plus agréable.

Mais Owlboy fait quelques entorses au néorétro, à commencer par les musiques orchestrales de Jonathan Geer dignes d’un grand film d’animation. Le seul thème nostalgique est celui de Vellie, le village du protagoniste, au début de l’aventure. Ses légers accents chiptune soulignent sa ressemblance avec le fameux thème de la lune de DuckTales – un choix judicieux pour un jeu aérien. Celui-ci se distingue ainsi d’emblée par une ambiance unique, une nouvelle fois très cinématographique, ce qui nous fait en revanche regretter que tout soit en anglais dans la mesure où la narration et les dialogues ont beaucoup d’importance. L’entrée en matière est en plus étonnante, avec une tonalité maussade et un protagoniste, Otus, en dessous de tout ! Contrairement à d’autres héros célèbres du genre action/aventure qui le paraissent par pure convention, le jeune hibou est réellement muet. De manière générale, il est petit et peu offensif, mais il peut soulever des poids étonnants pour sa taille et c’est là la principale mécanique du jeu. Cela permet de déterrer trésors et objets, de transporter des charges, et surtout d’emmener avec soi plusieurs alliés dont le premier, Geddy, dispose lui d’un canon pour éliminer les ennemis.

Le jeu regorge de moments contemplatifs et poétiques comme celui-là

Le jeu regorge de moments contemplatifs et poétiques comme celui-là

Ainsi, manier deux personnages simultanément offre d’emblée de nombreuses possibilités, mises en exergue par des énigmes bien senties. Il n’est cependant pas toujours facile d’identifier le type d’attaque qu’il faut pour détruire tel ennemi ou obstacle, et on peut trouver par exemple contre-intuitif que le tourbillon d’Otus, autre mécanique de gameplay importante, soit plus puissante que le canon de Geddy ! Et les choses se compliquent assez vite puisque l’on obtient également tôt la dernière mécanique de base, la roulade/dash, et on connaît alors la fonction de tous les boutons ! Un gameplay pas si rétro, donc, surtout en termes d’ergonomie, puisqu’il a été pensé pour les manettes Xbox. Celle de la PlayStation 4 peut cependant être employée via DS4Windows, et les développeurs ont d’ailleurs eu l’excellente idée de permettre quand même l’affichage de notifications sous formes d’icônes correspondant au pad Sony… Mais il faut donc bien comprendre que le jeu exploite quasiment tous les boutons de ces manettes modernes, avec des contrôles façon twin-stick shooter même s’il est possible d’utiliser la croix directionnelle pour les déplacements – le contraire serait étonnant de la part de D-Pad Studio !

Hélas, comme la plupart des titres utilisant le stick droit de la manette, Owlboy favorise les boutons de tranche au point d’utiliser les quatre… Or, s’il est tentant d’utiliser une gâchette analogique pour tirer dans un jeu, les développeurs ont peut-être oublié que les FPS et TPS d’aujourd’hui nous font plutôt manipuler des armes (semi-)automatiques. Or ici, maintenir la gâchette droite ne produit que quelques salves éparses avec Geddy, et marteler ce type de bouton se révèle très désagréable… Et cela devient encore plus délicat avec le troisième et dernier allié, Twig, qui effectue deux actions très différentes selon que l’on maintient ou que l’on appuie brièvement la gâchette ; la frontière entre les deux est parfois bien mince, en particulier dans le feu de l’action, contre un boss typiquement. De manière générale, ces affrontements peuvent s’avérer plus laborieux qu’ils ne le devraient parce qu’on s’emmêle les pinceaux entre les touches et les personnages. Et c’est sans doute plus subjectif, mais je trouve parfois difficile de maintenir une direction précise au stick en l’absence de base octogonale comme sur les anciennes manettes Nintendo… Mais je ne suis pas le seul à avoir galéré avec ces contrôles !

Les boss demandent de jongler entre les capacités d'Otus et de ses alliés

Les boss demandent de jongler entre les capacités d’Otus et de ses alliés

Il faut dire que certains ont aussi été frustrés par certains choix de gameplay, comme le fait que notre allié tombe quand on se fait toucher, ou qu’une simple attaque tourbillon le fait disparaître. Certes, il suffit en général de tirer pour le faire revenir, mais on aurait au moins aimé des portraits plus grands dans l’interface pour bien repérer le personnage actif. Un autre souci réside dans le magnétisme, à la fois dans la visée automatique de certaines armes qui peut avoir des ratés avec deux cibles trop proches, mais aussi et surtout lorsque l’on veut ramasser un objet ou activer un mécanisme avec la gâchette gauche alors qu’un allié est trop près ; ce dernier sera systématiquement porté en priorité et là encore, dans le feu de l’action, on n’aura pas forcément le temps de le déposer à l’écart… Et si certains problèmes sont plus étranges que gênants – la notification « Enter » devant chaque porte, même pour sortir ! – d’autres déçoivent davantage comme le scrolling. La caméra a en effet beaucoup de mal à suivre l’action, ce qui s’explique sans doute par la nature aérienne peu commune d’Owlboy, mais il reste étonnant qu’après plusieurs mises à jour, les développeurs n’aient pas trouvé de solution plus satisfaisante…

Heureusement, ce n’est pas vraiment rédhibitoire et si l’on est aussi pointilleux, c’est surtout que ces petits défauts jurent avec la réalisation exceptionnelle du jeu. Surtout que celui-ci a bien plus à offrir qu’un bel emballage, avec un level design souvent excellent, des énigmes intéressantes et certains combats de boss vraiment bien pensés. Alors bien sûr, comme la plupart des jeux (si ce n’est tous) que l’on adorés ici, comme Shovel Knight, Shantae and the Pirate’s Curse ou plus récemment The Way, il a son lot de pics de difficulté, de passages à s’arracher les cheveux… Les séquences d’infiltration ne seront par exemple pas du goût de chacun, même si on a connu largement pire en la matière, et certains boss, la séquence dans l’obscurité ou la chute de rochers à la fin sont quand même bien relevés. Mais on y arrive avec de la patience. Il est en revanche moins excusable que certains chemins soient difficiles à identifier, souvent parce que les développeurs ont mis des éléments de décor au premier plan comme s’il s’agissait de passages secrets. Cela dit, Owlboy parvient à rester globalement très lisible sans sacrifier ses graphismes, à l’inverse de titres au style plus moderne comme Ori and the Blind Forest

Le passage dans l'obscurité peut se montrer brillant comme laborieux...

Le passage dans l’obscurité peut se montrer brillant comme laborieux…

Le jeu a aussi le bon goût de ne pas s’éterniser car, si on peut le rattacher au genre Metroidvania, il se montre bien plus narratif que la plupart des titres du genre, et ponctué par de nombreuses et superbes cinématiques (utilisant ou non le moteur du jeu). Et il est aussi beaucoup plus linéaire, le backtracking ne s’intégrant pas à la progression comme dans un Metroid ; seuls les complétistes reviendront sur leurs pas pour dénicher tous les trésors facultatifs. C’est d’ailleurs uniquement dans ce cas-là que l’absence de carte se fait ressentir, puisque la structure générale du monde n’est encore une fois pas très complexe. Et pas de panique ! On vous fera bien comprendre que vous approchez de la zone finale et que c’est donc peut-être le moment de fouiller un peu plus… Il n’y a cela dit (a priori) pas grand-chose à collectionner à part les pièces, qui se trouvent dans les coffres ou s’obtiennent en franchissant des anneaux. Mais les choses se compliquent vite avec des trésors qui n’apparaissent que si on a éliminé tous les ennemis ou, plus anodin, des anneaux qui ne sont validés que si on traverse la série complète. Et Owlboy regorge aussi de passages secrets qui sont pour le coup extrêmement bien cachés…

L’argent collecté doit être ramené à une boutique mais, bizarrement, on ne le dépense pas ! Chaque palier atteint débloque une nouvelle amélioration, alternant entre l’augmentation de la jauge de vie et les améliorations de certaines armes. Les amateurs d’upgrades en tout genre risquent cependant de rester sur leur faim, car il est assez facile de tous les obtenir sans trop explorer, et seule l’amélioration finale demandera de récupérer carrément toutes les pièces. L’autre petite déception provient du fait que des chapeaux se cachent parmi les objets à débloquer, et que non seulement leur intérêt est purement cosmétique, mais on les perd au premier contact hostile… Pour rendre cette quête plus attractive, on aurait bien aimé une forme de radar, à défaut d’une carte, pour mieux trouver l’argent qui nous manque ; il faudra se contenter hélas du nombre de pièces par zones dans le menu. Mais il existe également une autre denrée à dénicher, trois disques dorés, qui semblent encore mieux cachés. En effet, votre serviteur n’en a trouvé qu’un et n’a pas la moindre idée de là où peuvent se trouver les deux autres !… Précisons enfin qu’Owlboy n’est pas non plus très généreux en matière de succès, au nombre de douze.

Une zone cachée avec des anneaux à franchir

Une zone cachée avec des anneaux à franchir

Il m’aura fallu une dizaine d’heures sans trop me presser pour voir la fin de l’aventure, sachant que je n’ai débloqué aucun de ces succès, D-Pad Studio ayant fait le choix finalement plus intelligent de ne récompenser que les objectifs secondaires, plutôt que de valider chaque étape obligatoire comme le font beaucoup de jeux de nos jours… Le challenge se veut donc plutôt à l’ancienne, même si les sauvegardes sont automatiques et les checkpoints relativement nombreux ; il faut juste faire attention à la petite notification pour savoir quand s’arrêter – le beau souci de tout Metroidvania… En cas de game over, on ne revient donc pas très loin et avec son énergie remontée à bloc. Cela pourrait rendre la présence de fruits parfois bien pénibles à ramasser superflue, s’ils ne pouvaient pas faire monter la jauge (légèrement) au-delà de son maximum. Néanmoins, comme l’indique le numéro de version long comme le bras et en dépit de son temps de développement record, Owlboy fait encore l’objet de mises à jour régulières pour mieux doser tout cela. Et il faut bien avouer que s’il n’était pas aussi beau et (assez souvent) passionnant, on serait sans doute moins indulgent vis-à-vis de ses (pas si) petits défauts…

Verdict : L’attente a été longue mais en valait la chandelle, ne serait-ce que pour la réalisation de haut vol de ce Owlboy, qui ne pèche que par l’ambition de son gameplay pas si rétro…

100hbpm

Lien Permanent pour cet article : https://mag.mo5.com/106108/test-owlboy/