TEST : Battle Princess Madelyn

Battle Princess Madelyn (Windows, Xbox One, PlayStation 4, Vita, Wii U, Switch)BATTLE PRINCESS MADELYN
Windows, Xbox One, PlayStation 4, Vita, Wii U, Switch
Catégorie : action/plateformes
Joueurs : 1
Développeur : Causal Bit Games
Éditeur : Hound Picked Games
Date de sortie : 06/12/2018 (PC/Xbox One), 07/01/2019 (Switch)
Prix : 14,99 € – 19,99 €
Site Officiel : https://www.houndpicked.com/battle-princess-madelyn/
(testé sur Switch, copie fournie par l’éditeur)

Comme on le rappelait en introduction de notre preview publiée au lancement de la campagne Kickstarter du jeu, Battle Princess Madelyn jouit depuis le départ d’un sacré capital sympathie, déjà par sa ressemblance évidente avec Ghouls’n Ghosts (1988), mais aussi sa genèse particulière. En effet, il a été conçu avant tout pour répondre à la demande et en suivant les conseils de la fille du développeur, Christopher Obritsch, et ce dernier en a profité pour rendre hommage à son chien Fritzy disparu quand il avait neuf ans. Tout cela est fort mignon mais, après la déception d’Insanity’s Blade du même studio et, dans une moindre mesure mais dans un registre similaire, celle de Fox n Forests, on a suivi ce développement avec une certaine prudence… Et le premier contact nous a donné raison, entre le dessin animé d’intro joli mais en basse résolution, les polices de texte qui pixelisent lorsqu’elles ne sont pas sur fond noir, l’interface tout en anglais, les contrôles non configurables ou encore les boutons de menu inversés « à l’occidentale » sur Switch : des petits détails, certes, mais qui font une mauvaise impression d’ensemble… Et elle ne se dissipe pas en lançant le jeu ; on ira sûrement visiter le village à gauche en voulant ramasser des pièces, et on découvrira d’emblée plein de PNJ et presque autant de quêtes secondaires. Et impossible de les visualiser quelque part ou de redemander les instructions aux villageois !

Cela dit, avant même l’arrivée des patches, Battle Princess Madelyn marquait un net progrès par rapport à Insanity’s Blade. Déjà sur le plan technique, il se montre moins excessif sur le loot par exemple, même si les pièces ont tendance à partir dans tous les sens (même quand le jeu est en pause !) tandis que les sacs disparaissent bien vite. Néanmoins, Christopher Obritsch n’a une nouvelle fois pas lésiné sur les détails, ce qui pose parfois des problèmes de lisibilité entre les éléments de décors interactifs (plateformes, portes) et ceux à l’arrière-plan. Les effets de particules sont aussi bien généreux (notamment les gerbes d’eau quand on saute sur une barque ou autre) mais le framerate tient le coup – du moins depuis le patch ; trois zones de l’aventure étaient auparavant quasi-injouables car les commandes ne répondaient pas toujours… Les transitions d’un niveau à l’autre, en particulier lorsqu’on se téléporte – la carte de la preview a disparu –, manquent encore de souplesse cela dit. Et puis certains bugs ont visiblement survécu aux mises à jour comme le trousseau de clés en double dans l’inventaire, mais j’espère que d’autres plus bloquants ont été corrigés comme les ennemis qui oublient d’apparaître lors d’un sauvetage (obligation de quitter la partie !), ou certains détails mineurs mais perturbants comme ce personnage au village qui réclame une baguette (wand) alors qu’il veut le sceptre (staff)… 

Malgré les effets de lumière et de particules, il y a un cachet old school
Malgré les effets de lumière et de particules, il y a un cachet old school

Mais c’est aussi ce foisonnement de détails qui rend le jeu extrêmement beau tout en restant rétro, comme une extrapolation 32-bit de Ghouls’n Ghosts (1988). À ce sujet, les musiques de Javier García « Gryzor87 » sont excellentes (la Russie !), dans l’esprit de Cursed Castilla. J’avoue hélas ne pas avoir beaucoup entendu l’autre bande-son, symphonique, car il faut revenir au menu principal pour en changer… Côté game design, c’est plus compliqué et ça dépend du mode, Story ou Arcade. Le gameplay est en lui-même classique et efficace, retrouvant le feeling du classique de Capcom sans la difficulté impitoyable. On meurt aussi après deux coups (du moins avec l’armure de base) mais on réapparaît aussitôt si la jauge de Fritzy est assez remplie, sachant qu’elle se recharge en éliminant les ennemis. Si on a moins de trois crans, on retourne au début de la zone courante (ou avant le boss le cas échéant). Ce système pourra toutefois se montrer frustrant quand la chair à canon manque, d’autant que les ennemis respawnent nettement moins que dans Insanity’s Blade, et surtout pas n’importe où. Et c’est vraiment pénible dans certaines phases de plateformes où l’on peut être touché en plein saut (par ces maudits archers de la caverne de Swamplands on the Outskirts, typiquement), ne pas pouvoir corriger sa trajectoire pendant le moment d’invulnérabilité, mourir et réapparaître sur la terre ferme, soit parfois très loin…

Or le level design du mode Story est très rapidement complexe avec divers embranchements, voire carrément labyrinthique et multidirectionnel… Et malgré la présence de panneaux fléchés et les patches qui sont censés avoir arrangé les choses, on sait rarement où aller. Faute de pouvoir regarder en haut ou en bas (¹), on sera bien souvent obligé de sauter à l’aveugle, en particulier dans l’eau de Valley of Hightide et dans la caverne décidément horrible de Swamplands on the Outskirts, quitte à corriger sa trajectoire au dernier moment avec le double saut – si on l’a obtenu. Cela peut toutefois se faire très vite, car il est donné par un boss de la deuxième zone juste en-dessous du village avec le téléporteur, mais « planqué » par l’une de ces fichues mains de boue difficiles à esquiver… sans double saut (²). De manière générale, Battle Princess Madelyn ne prend pas le joueur par la main mais il retrouve plus le côté obtus d’un The Tower of Druaga (1984) qu’autre chose, hélas. Par exemple, outre le fait qu’il est recommandé de noter ce que disent les PNJ concernant l’endroit où accomplir les quêtes, le premier conseil qui nous suggère de respecter les statues est très important. C’est même une mécanique de base du jeu : s’accroupir quelques secondes devant « certaines choses » pour obtenir des bonus. Sans doute un clin d’œil à Cursed Castilla qui faisait lui référence à Simon’s Quest (1987), sauf qu’ici c’est indispensable !

Great Town in Spain est une zone en hommage à Cursed Castilla
Great Town in Spain est une zone en hommage à Cursed Castilla

En mode Story comme en mode Arcade, on nous fait parcourir (linéairement ou pas selon le cas) dix grandes zones (Boneyard of the Royals, Swamplands on the Outskirts, Valley of Hightide, Farmlands of Desolation, Cliffs of Despair, Mountain Village in Russia, Forest Town in Germany, Great Town in Spain, Seaside Town in Italy plus Castle Ruins of the Ancestors), chacune étant constituée de deux parties, l’une en extérieur et l’autre souvent en intérieur, mais avec seulement un téléporteur par zone ! Selon le mode, on se coltinera donc pas mal d’allers-retours, obligeant à refaire des passages bien pénibles – au hasard la caverne de Swamplands on the Outskirts… Cela dit, des « donjons » au sein de chaque zone, et dont les accès sont bloqués par des portes dont il faut trouver la clé au préalable, feront parfois office de raccourcis ou du moins de chemins alternatifs. Et si la montée en puissance de Madelyn adoucit l’exploration, le level design se révèle bien trop maladroit pour que Battle Princess Madelyn relève du Metroidvania. Par exemple, après le premier boss, on apparaît au téléporteur de la deuxième zone. Il est du coup tentant pour un joueur aimant explorer (histoire de valider quelques quêtes secondaires) de l’emprunter pour revenir à la première, sauf qu’une fois revenu, le premier téléporteur est trop haut sans double saut ! Il faut donc impérativement refaire la première zone (pas son boss heureusement) pour revenir à la deuxième… mais pas au même endroit cependant, et plus loin du boss qui donne le double saut.

Mais la véritable faute de goût tient à ce système de quêtes secondaires, certes plus automatisé que dans Insanity’s Blade, mais allongeant là aussi la durée de vie du mode Story artificiellement. Non seulement on ne sait pas où se trouve l’objet de chaque mission en dehors de la zone (du moins si on a pensé à la noter), mais on ne connaît pas la récompense à l’avance. Or la plupart sont totalement facultatives, offrant des cristaux très rapidement inutiles ou des poupées à collectionner – l’influence de la fille du développeur ? Et en plus, elles sont rarement passionnantes, lorsque l’on doit typiquement libérer un « otage » qui disparaît bien brutalement après avoir éliminé un nombre donné d’ennemis, parfois moins de dix, parfois une cinquantaine… Le problème est que certaines quêtes sont récompensées par des clés et certaines d’entre elles sont indispensables, ce qui fait d’autant plus regretter leur gestion incompréhensible. Il y en a de deux types, pour les boss et les donjons évoqués plus haut, mais on ne comprend jamais si les clés sont par ailleurs interchangeables, d’autant que certaines portes de boss ne semblent s’ouvrir que si on a battu celui d’avant au préalable ! Et outre les boss, la clé du donjon de la deuxième zone est quasiment aussi importante, permettant d’accomplir la quête du forgeron et donc d’améliorer son équipement. Du coup, quand je l’ai enfin trouvé, j’avais déjà atteint la cinquième zone…

La meilleure armure fait hélas moins Ghouls’n Ghosts que celle d'avant...
La meilleure armure fait hélas moins Ghouls’n Ghosts que celle d’avant…

Et comme on ne peut booster que deux fois, d’une part l’armure et d’autre part toutes les armes possédées (à la fois), autant dire que j’avais déjà accumulé assez d’argent et de cristaux pour quasiment tout améliorer. J’ai même regretté de monter plus tard mes armes au troisième niveau, car cela fait étrangement perdre le tir triple bien pratique des dagues. Et avec une armure qui permet de prendre cinq coups au lieu de deux, l’aventure devient bien plus abordable – j’ai battu presque tous les derniers boss du premier coup ! En termes de difficulté, du moins, car cela ne vous empêchera pas d’être bloqué à plusieurs reprises… Encore une fois, la progression n’a hélas rien de naturel ; en dépit du fléchage on n’est jamais sûr d’avoir déjà visité tel endroit ou d’emprunter le chemin « normal » d’autant que certains passages obligatoires sont presque cachés, comme dans le château de Forest Town in Germany… Précisons aussi qu’en mode Story, seules les cinq premières zones sont accessibles initialement et qu’il faut réunir les trois parties du « Stitchbot » (ce qui nécessite de battre trois boss principaux parmi ceux des cinq premières zones) pour entamer la seconde partie de l’aventure… et découvrir enfin un nouveau pouvoir du chien Fritzy, cette fois offensif – celui qui était disponible dans la démo. Les quatre nouvelles zones sont moins labyrinthiques, mais obtenir les quatre pierres ne sera pas simple pour autant.

En un sens, Battle Princess Madelyn est un jeu d’auteur ; on identifie tout de suite la touche Causal Bit Games, maladroitement généreuse sur le plan visuel comme du contenu. Et si ce nouveau titre n’est pas passé d’une réalisation 8-bit à 16-bit en cours de route comme Insanity’s Blade, il a lui aussi été vendu initialement comme un jeu au feeling arcade. Mais c’est comme si Christopher Obritsch n’osait pas proposer aux joueurs d’aujourd’hui un trip trop old school, et se sentait obligé de coller des éléments de RPG pour compliquer inutilement le concept et rallonger la durée de vie… Au moins, cette fois, le mode Arcade linaire était disponible d’emblée alors qu’il avait été ajouté par la suite dans le jeu précédent, mais il est très révélateur qu’une des mises à jour a inversé sa position avec le mode Story dans le menu principal, officiellement « pour que les nouveaux joueurs puissent profiter de certains équipements disponibles plus tard en mode Story » mais surtout parce que le mode Arcade répond plus à leurs attentes d’un successeur spirituel de Ghouls’n Ghosts (1988) – ou d’un nouveau Cursed Castilla… Le pouvoir de résurrection y est en plus disponible, et on trouve en effet rapidement des armes que je n’ai jamais croisées dans le mode Story, qui sont ici boostées dès que l’on ramasse des armures. En revanche, il faudra boucler tous les niveaux (au level design totalement différent) d’une traite, sans possibilité de sauvegarder !

Verdict : D’une générosité parfois maladroite dans sa réalisation comme dans l’aventure qu’il propose, Battle Princess Madelyn reste un hommage le plus souvent attachant à Ghouls’n Ghosts.

80 hbpm

Lien Permanent pour cet article : https://mag.mo5.com/152555/test-battle-princess-madelyn/