TEST : Streets of Rage 4

Streets of Rage 4 (Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch)STREETS OF RAGE 4
Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch
Catégorie : beat ’em up
Joueurs : 1-4
Développeur : LizardCube & Guard Crush Games
Éditeur : DotEmu
Date de sortie : 30/04/2020
Prix : 24,99 €
Site Officiel : https://www.streets4rage.com/
(testé sur Steam, copie fournie par l’éditeur)

Dire que Streets of Rage 4 était attendu relève de l’euphémisme, compte tenu du défi à relever d’être au niveau d’une trilogie mythique de la Mega Drive, et dans un genre emblématique de son époque. Il n’est donc pas très étonnant que la direction artistique signée Lizardcube (Wonder Boy: The Dragon’s Trap), aussi bluffante soit-elle, ait quand même divisé, et que la bande originale ait d’emblée constitué un sacré enjeu. Il aura fallu attendre près d’un an pour avoir la confirmation que Yūzō Koshiro et son complice Motohiro Kawashima avaient été sollicités, pour finalement découvrir qu’Olivier Derivière était en fait le compositeur principal à peine plus d’un mois avant la sortie… Pour crever l’abcès, la bande son est globalement satisfaisante – aucun morceau n’est mauvais – mais inégale,  puisque ça manque forcément un peu d’unité vu le nombre de guests. Mais la surprise est que, paradoxalement, les quelques pistes de Koshiro m’ont déçu, car peu inspirées et/ou manquant de pêche, quand Derivière a signé mes thèmes préférés (Rising Up qui n’a rien d’une musique d’ascenseur) ! Cela dit, tout en explorant parfois des genres très différents des jeux originaux, le Français rend plusieurs fois « hommage » à ces derniers avec de belles reprises (*) se permettant quelques envolées lyriques… L’intégriste devra quoi qu’il en soit faire son deuil, ou aller dans les options pour cocher « musiques originales » (aussi valables pour les menus). Ce que l’on ne pourra pas faire pour les graphismes même si, franchement, ça tape. C’est truffé d’effets et de petits détails, et c’est presque dommage d’y avoir intégré les persos d’origine en pixelart – du fan service avant tout.

Mais les personnages rétro devront être débloqués en faisant grimper son score cumulé, de même que la version « moderne » d’Adam Hunter, obtenu lui après le quatrième niveau. Au départ, côté modes, seuls Histoire, Duel (du PvP jusqu’à quatre en arène) et Online (deux joueurs maximum) sont disponibles et on obtiendra, après avoir bouclé l’aventure, le choix du niveau ainsi que les modes Arcade (qui consiste à one-crediter le jeu d’une traite avec le même personnage) et Combat de Boss. Plus bas dans le menu, on trouve la rubrique Extras avec des fiches et galeries (mais pas de sound test hélas) à déverrouiller, et des options où l’on peut, entre beaucoup d’autres, activer les contrôles classiques (à trois boutons façon Mega Drive), choisir (du moins sur PC) si les touches de l’interface doivent reprendre les manettes Xbox, PlayStation ou Switch – ce qui n’est pas si commun et très bien vu – et même définir l’apparence des deux « mets » qui redonnent de l’énergie (pomme et poulet  traditionnels par défaut). Enfin on trouve la rubrique Techniques pour apprendre comment ça se joue. Parce que même si globalement, ça reprend les (excellentes) bases de Streets of Rage II (1992) et que les habitués retrouveront vite leurs marques, il y a quand même des nouveautés. Certaines tiennent plus de l’option de confort, comme les raccourcis pour certaines combinaisons de boutons. Ainsi, l’attaque arrière peut s’effectuer de nombreuses manières : avec la direction arrière tout simplement, avec les boutons d’attaque et de saut à l’ancienne ou avec la gâchette droite. Mais d’autres ajouts changent pas mal la donne…

Les développeurs ont fait de gros efforts pour intégrer les persos rétro
Les développeurs ont fait de gros efforts pour intégrer les persos rétro sur le plan du gameplay mais, visuellement, ça fait forcément bizarre…
(notez le clin d’œil de la fresque murale)

On l’avait constaté dans notre preview, il y a déjà celui d’un bouton ramasser (celui de droite), qui permet d’éviter de prendre un en-cas trop tôt par erreur, même s’il arrivera de lancer son arme en voulant prendre autre chose à la volée… Cette touche peut même s’utiliser en saut (en théorie) et, avec un peu d’habileté, on peut aussi rattraper une arme après qu’elle a rebondi dans la figure d’un ennemi ! Mais certains d’entre eux savent le faire également… Les joueurs disposent de deux attaques spéciales « gratuites » dont une nouvelle, un coup chargé et puissant – que vous aurez peut-être tendance à oublier comme moi – en maintenant le bouton et l’attaque Blitz avec deux fois avant (le fameux grand upper d’Axel), mais on retrouve également le bouton de spécial qui fonctionne là encore comme dans Streets of Rage II. Il dispose désormais de trois variantes, l’une immobile et défensive, une autre plus offensive (avec avant) et enfin une version aérienne. On perd toujours de l’énergie à chaque fois, mais la nouveauté est que la partie perdue est verte et peut être récupérée si l’on enchaîne ensuite les ennemis sans se faire toucher. Évidemment, les puristes vont hurler à la casualisation mais, hormis en Facile, ça reste quand même à double tranchant… Enfin, il y a encore une autre attaque spéciale que beaucoup risquent d’oublier au début, « l’attaque étoile » (en combinant les boutons de spécial et de ramassage ou via le bouton de tranche droit) qui remplace en quelque sorte l’intervention de la police du premier volet. Encore plus spectaculaire, mais hélas pas si puissante contre les boss en particulier, elle requiert des étoiles comme son nom l’indique. On commence chaque niveau avec une seule (quelle que soit la difficulté, étrangement) et on en ramasse parfois, là encore comme dans le jeu inaugural.

Comme on l’avait aussi noté dans la preview, le feeling n’est quand même pas tout à fait identique à celui du deuxième épisode de la série et se révèle à vrai dire plus vif. Les coups s’enchaînent plus vite, les ennemis sont projetés moins loin, rebondissent contre des parois et même les « bords » de l’écran pour faciliter les juggles. Par ailleurs, la technique de l’ukemi, qui consiste à appuyer sur saut au moment de toucher le sol après une projection pour se rétablir plus vite, présente un timing très indulgent. En outre, alors que la première partie du premier niveau constitue un « hommage » fort classique, la seconde surprend déjà par la présence de dangers environnementaux (des câbles électrifiés au sol) si tôt dans l’aventure… On en trouvera d’ailleurs dans presque tous les stages (trous, mares d’acide, barils explosifs, etc.) et, si les ennemis y sont également sensibles, le(s) joueur(s) pourront le plus souvent récupérer là encore l’énergie perdue ; le gameplay fait de manière générale un usage astucieux de cette mécanique. Néanmoins, malgré la disparition du temps limité et le fait de désormais conserver ses armes quand on change de zone, Streets of Rage 4 n’est pas un jeu facile. Sur les cinq modes de difficulté (dont l’emblématique « Mania » à débloquer), j’ai commencé avec le deuxième, Normal.  Et j’ai eu beaucoup de mal à passer le deuxième niveau, le commissariat. Certes, les ennemis (policiers et détenus) se frappent entre eux, mais les premiers sont déjà bien pénibles quand ils sont équipés de tasers, ou munis de boucliers (cf. ci-dessous) qu’il faut détruire avant qu’ils ne se rechargent – et ils ne manqueront pas de vous donner un coup de matraque pendant que vous vous acharnez dessus bien sûr…

Cet ennemi (le policier au bouclier) est crispant, mais d'autres en apparence plus banals peuvent se révéler insupportables en groupe !
Cet ennemi est crispant, mais d’autres en apparence plus banals peuvent se révéler insupportables en groupe !

Le boss qui suit est en plus bien coriace et, même si les suivants m’ont paru en comparaison plus simples, ce sont de gros sacs à PV – une impression amplifiée par la présence d’une jauge unique désormais. Ils sont en outre rarement seuls, et il faudra faire preuve d’audace pour utiliser ces minions afin de récupérer de la vie après un coup spécial… Donc, même si j’en connais qui vont finir le jeu les doigts dans le nez, le game over risque d’arriver souvent pour un joueur moyen avec trois vies en Normal. Car certes, les crédits (*) sont infinis et si on quitte, on reprendra au dernier niveau atteint, mais on recommence au début de celui-ci et non là où l’on meurt – une différence conséquente avec les jeux Mega Drive. Toutefois, au moment de retenter sa chance, on peut activer une aide personnalisée (des vies, des étoiles en plus ou les deux) compensée par une division du score, ce qui ne devrait pas donner beaucoup de scrupules aux petits joueurs… Cette option est aussi disponible dans le menu pause à condition de recommencer le niveau là encore, et elle se désactivera une fois celui-ci passé. Après, j’ai peut-être galéré au début parce que je m’entêtais à jouer Axel Stone, et j’ai fini par réussir avec l’un des nouveaux, Floyd Iraia, qui a une sacrée allonge. En revanche, ce sacré gaillard saute encore moins haut et loin que Max ! C’est là où Streets of Rage 4 retrouve, et amplifie même, une caractéristique des originaux ; les personnages sont très différents et certains mieux adaptés suivant les situations. Et alors que cela pouvait être frustrant par le passé avec le lent Adam qui pouvait galérer contre certains boss rapides, on peut désormais changer de combattant avant de passer au niveau suivant (sauf en mode Arcade).

Je suis personnellement à l’aise avec Blaze Fielding, déjà très efficace dans les épisodes précédents. Toujours aussi rapide, son balayage arrière est une tuerie mais ses attaques Blitz et spéciale sautée, toutes deux très aériennes, peuvent passer au-dessus des ennemis ! Elle dispose aussi d’une attaque Blitz au couteau, tandis que Cherry Hunter peut courir et Floyd fracasser deux ennemis l’un contre l’autre… Et évidemment, combiner ces atouts sera plus efficace à plusieurs, les ennemis n’étant pas forcément plus nombreux – mais les bonus non plus. En tout cas, en solo et en Normal, Streets of Rage II était bien plus facile que ça… Ayant reçu ma copie sur le tard, moins d’une semaine avant la sortie du jeu, j’ai d’ailleurs fini par lancer une seconde partie en Facile (bien calmé par Chinatown en Normal) afin d’être certain d’avoir vu le bout de l’aventure pour préparer ce test. Et c’est autrement plus abordable, peut-être même un peu trop, avec plus du double de vies (sept ou lieu de trois), des ennemis moins nombreux et moins résistants – sauf les boss semble-t-il, ce qui marquerait une nette différence avec la trilogie originale – et surtout des coups spéciaux quasi-gratuits ! Un seul coup suffit à récupérer sa vie, et il faut donc penser à les utiliser sans parcimonie cette fois, ce qui n’est pas toujours évident quand on a pris l’habitude de ne pas en abuser… C’est je pense le principal reproche que je ferais à Streets of Rage 4 : son dosage de la difficulté. L’écart est à mon sens trop marqué entre les modes Facile (finissable du premier coup) et Normal, sachant que Mania serait en revanche plus abordable qu’autrefois…

Streets of Rage 4 (Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch)
L’attaque étoile de Floyd a une portée plus grande que celle des autres personnages

Même si j’ai rarement l’occasion de jouer à plusieurs de toute façon, je vais utiliser le prétexte du confinement pour admettre que je n’ai pas pu tester le multijoueur jusqu’à quatre en local. En revanche, j’ai pu essayer le jeu en ligne (à deux uniquement) avec notre membre Vanessa « Shenron » Lambert qui préparait elle le test pour SEGA-Mag. Le mode Duel est hélas aussi peu convaincant qu’à l’époque, à deux en tout cas, malgré un plus grand nombre d’arènes. Certaines d’entre elles comportent des dangers voire même des ennemis, mais ça manque d’armes par exemple et en l’absence d’esquives ou de possibilité de bloquer, ce PvP n’est pas captivant et fait ressortir les différences entre les persos modernes et les anciens – en particulier ceux du volet inaugural. Nous avons également parcouru toute l’aventure en Normal, ce qui a déjà permis de vérifier que c’est en effet plus facile à deux, et surtout qu’il n’y a pas trop de lag même avec des connexions classiques – en tout cas pas au point d’handicaper les joueurs. Le timing de l’ukemi m’a peut-être paru parfois plus difficile, mais c’était peut-être lié au manque de concentration… On n’est donc pas loin d’un sans-faute, même si l’on ne pourra s’empêcher de regretter l’absence de certains personnages jouables, notamment deux qui ne sont proposés qu’en version « rétro » alors qu’ils apparaissent en version « moderne » durant l’aventure – et avec tous leurs coups semble-t-il. Ce sera peut-être pour des DLC, et on ne serait d’ailleurs pas contre une Estel jouable !…

Verdict : Sans pour autant faire oublier les originaux mais ce n’est précisément pas son but, bien au contraire, Streets of Rage 4 est un très grand beat ’em up, à la hauteur de son illustre nom.

110 hbpm

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