TEST : Huntdown

Huntdown (Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch)HUNTDOWN
Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch
Catégorie : stalk and gun
Joueurs : 1-2
Développeur : Easy Trigger Games 
Éditeur : Coffee Stain Publishing
Date de sortie : 12/05/2020
Prix : 19,99 €
Site Officiel : http://huntdowngame.com/
(testé sur Switch)

Huntdown, ce n’est pas seulement un trip rétro sur le plan ludique, c’est avant tout une ambiance années 1980 truffée de références… C’est flagrant dès l’introduction en pixelart mais accompagnée d’une voix off digne d’une série B de science-fiction, et d’une musique synthwave davantage anachronique car bien d’aujourd’hui dans sa nostalgie. Le jeu se déroule bien sûr dans ce fameux « futur proche » gangréné par les guerres de gangs, rappelant forcément des films comme Les Guerriers de la nuit (1979), New York 1997 (1981), Running Man ou RoboCop (1987) entre autres,  et les clins d’œil ne se limitent pas au cinéma puisque le troisième boss, un catcheur, imite Randy « Macho Man » Savage par exemple. L’intro passée, on nous propose de démarrer une partie à un ou deux joueurs (sachant qu’un deuxième larron peut rejoindre la partie à tout moment via le menu pause), de jeter directement un œil aux crédits ou de régler quelques options. Citons en vrac la possibilité de désactiver la couverture automatique et les secousses de l’écran, de régler la quantité de sang (trois niveaux, haute par défaut) ou encore d’ajouter un filtre CRT. Et bien qu’il faille l’activer manuellement, une traduction des textes en français est disponible, et elle est plutôt bonne globalement hormis des sous-titres qui dépassent parfois du moniteur virtuel lors du briefing et quelques bizarreries (« normale difficulté »)… À ce sujet, on a le choix initialement entre trois niveaux de difficulté  sachant qu’un quatrième (« dur à cuire ») se débloque une fois que l’on a terminé le jeu.

Ensuite, on a le choix entre trois chasseurs de prime qui ne se différencient pas seulement par leurs looks mais aussi par leurs deux armes par défaut. Cela peut sembler superficiel, mais on se retrouvera parfois avec elles seulement (en particulier contre les boss), et l’arme secondaire peut même se révéler plus utile que les grenades et autres cocktails Molotov aux trajectoires bien difficiles à gérer dans la pratique… Quoique la puissante hachette d’Anna Conda a un défaut similaire, mais son flingue tire une salve de mitrailleuse pour compenser. John Sawyer, le héros à la mâchoire (littéralement) d’acier bénéficie du revolver le plus puissant mais son boomerang laisse à désirer, tandis que Mow Man, le cyborg aux répliques qui tuent, a le pistolet le moins efficace mais ses triples kunais sont excellents – ils traversent plusieurs ennemis à la fois, mais nécessitent un cooldown pour être réutilisés… On pourra de toute façon essayer ces différents persos en cours d’aventure, mais il faudra pour cela penser à aller dans le menu pause depuis le choix de la mission – ce qui n’est pas très intuitif – car, si vous le faites en jeu, il faudra recommencer le niveau depuis le début. Ensuite, on se retrouve face à un écran avec quatre quartiers et les gangs respectifs qui les tiennent, mais on n’aura aucun choix cette fois puisque seul le premier est déverrouillé au départ, ce qui est certes loin d’être inhabituel dans un jeu vidéo, mais peut quand même surprendre dans ce contexte où l’on incarne un chasseur de primes…

Apparemment on peut ressusciter son partenaire en coopération
Apparemment on peut ressusciter son partenaire en coopération, mais on n’a hélas pas pu tester cette option uniquement disponible en local…

C’est même un des aspects (un peu) décevants du jeu d’Easy Trigger Games, puisque l’aventure est parfaitement linéaire alors que je crois me souvenir qu’on avait directement accès à (au moins) deux territoires dans la bêta privée fin 2018. Et il en est de même pour chaque gang où l’on éliminera chaque « cible » l’une après l’autre dans un ordre imposé. Et si la zone n’affiche pas 100% une fois bouclée, ce n’est pas parce que des niveaux supplémentaires ont été débloqués, mais parce qu’il reste des objectifs secondaires à remplir. En effet, chaque mission en comporte trois, « Chasseur », « Collectionneur » et « Survivant ». On cherche encore à comprendre l’intérêt du premier qui consiste à tuer un certain nombre d’ennemis, dans la mesure où l’on peut rarement se permettre d’en laisser se balader de toute façon – et le temps n’est pas limité… Le deuxième est le plus intéressant, car il demande de trouver trois mallettes dans chaque niveau, certaines étant parfois bien cachées (derrière un mur à faire sauter par exemple), et surtout d’autres demandant d’éliminer son propriétaire. Or ce dernier fuit en vous apercevant et ne manquera pas d’encourager ses potes de se sacrifier pour lui ! Enfin, le troisième objectif est le plus retors car il demande de terminer la mission sans mourir, ce qui est loin d’être une mince affaire (hormis en Facile), en particulier contre les boss… Ce sera en tout cas l’occasion de refaire les niveaux plusieurs fois, et la marge de progression est pour le coup vraiment très bonne ; c’est le genre de jeu qui repose sur l’apprentissage, même s’il y a (hélas parfois) des petits aspects aléatoires.

Mais Huntdown repose heureusement sur un gameplay à la fois simple et riche. On aura certes tendance à oublier certaines possibilités pourtant bien utiles comme le dash qui se déclenche via le bouton de tranche droit, y compris en saut vers le bas pour piétiner les ennemis. Mais d’autres sortent toutes seules comme les coups de pieds automatiques au corps-à-corps, la glissade avec bas en courant, la mise à couvert avec bas ou simplement avant vers l’obstacle… Et appuyer sur haut pour se cacher à l’arrière-plan à la Rolling Thunder (1986) deviendra vite une seconde nature, d’autant que votre chasseur de primes sort automatiquement de sa planque pour tirer et n’a même pas besoin de le faire pour ramasser une arme par exemple. Le jeu utilise cependant les quatre boutons de face avec celui du haut pour l’arme secondaire, et celui de droite pour ramasser les armes (et les lâcher en maintenant le bouton) ; ce n’est donc pas automatique et tant mieux car on a justement besoin de jongler constamment avec. Les armes sont en effet très différentes, entre le fusil à pompe efficace mais à courte portée et la gatling surpuissante mais très lente au démarrage… Et même si on ne peut pas, hélas, en porter deux à la fois, il est possible de ranger son arme (toujours avec le même bouton) afin d’économiser les munitions (pour faire sauter un baril typiquement) ou lorsqu’on a vraiment besoin d’une arme à distance entre deux coups de batte.

On peut faire tomber les bidons sur l'ennemi avec le lance-missiles
On peut faire tomber les bidons sur l’ennemi avec le lance-missiles,et la caisse contient peut-être un bonus mais il faudra un explosif pour le vérifier…

Et tout cela suffit à rendre Huntdown facile à prendre en main mais pas si simple à maîtriser, plaisant à jouer voire jubilatoire quand notre plan se déroule sans accroc. Il faut dire que, même si certaines situations de level design se répètent inévitablement, le jeu offre plein de petites subtilités entre les couverts destructibles, les cachettes à l’arrière-plan qui ne protègent pas de toutes les attaques et le coup de pied qui s’enchaîne parfaitement avec un tir et permet ainsi d’économiser des balles… Grâce une grande variété d’armes, il y a toujours moyen d’affiner sa tactique, ce qui est bien utile quand on galère – les checkpoints sont heureusement fréquents, sauf à quelques endroits plus épineux. Il ne sera donc pas rare de recommencer plusieurs passages jusqu’à trouver le bon ordre dans lequel abattre les ennemis qui arrivent parfois de tous les côtés, mais surtout les boss qui demandent beaucoup de jugeote et surtout de patience. Quand j’avais joué à la bêta fin 2018, j’avais pu tester de mémoire les deux premiers territoires en entier, sauf que je n’étais pas parvenu à vaincre l’avant-dernier boss du second, Teddy Taxman, qui peut être d’emblée très problématique si l’on ne démarre pas l’affrontement avec le bon armement pour éliminer ses tourelles sans (trop de) dommages. J’ai fini cette fois par le vaincre en Normal après pas mal d’essais, et surtout sauvé une nouvelle fois de justesse par les kunais de Mow Man… Et il en a été de même avec le boss suivant, le chef des Misconducts (le gang des hockeyeurs), qui est même mort en même temps que moi, ce que le jeu a comptabilisé comme une victoire – ouf !

C’est là où la chance entre hélas un peu en jeu parfois. Les boss constituent à la fois clairement le point fort de Huntdown mais aussi, sinon la limite, un point potentiellement bloquant pour pas mal de joueurs. Quand ils ne reprennent pas carrément leur jauge énergie (déjà plutôt longue de base), ils ont souvent une « seconde forme » encore plus frénétique, qui demande au joueur non seulement d’esquiver leurs assauts encore plus nombreux, mais aussi les éventuels pièges (plafond qui s’écroule, canon laser, tourelles, mines, etc.) et les attaques d’ennemis qui arrivent en renfort. D’un autre côté, ces derniers sont aussi là pour apporter des armes et même des bonus de vie mais, dans la mesure où ils ne redonnent qu’un seul point d’énergie, on en perd parfois plus qu’on en récupère dans l’opération… Vous l’aurez compris, le jeu d’Easy Trigger Games demande beaucoup plus de réflexes qu’un « stalk and gun » plus calme comme on en faisait dans les années 1980. D’ailleurs, comme pour Streets of Rage 4, après avoir atteint la moitié de l’aventure en Normal (non sans difficulté), j’ai démarré une seconde partie en Facile pour pouvoir publier ce test plus rapidement. Et c’est clairement plus abordable même si la marge de progression y est aussi pour beaucoup – j’ai d’ailleurs eu nettement plus de mal sur la seconde moitié que je découvrais… Je soupçonne en tout cas ce niveau de difficulté d’avoir été ajouté depuis la bêta qui, hormis le nombre de zones, semblait déjà quasi-définitive en termes de réalisation voire de gameplay.

Huntdown (Windows, Xbox One, PlayStation 4, Switch)
Dommage qu’on n’ait pas le temps d’admirer le paysage avec ce boss redoutable…
Fun fact : Je ne l’avais pas encore affronté quand j’ai écrit ce commentaire mais j’avais deviné qu’il était retors – ils le sont (presque) tous !

Et en parlant de réalisation, elle mérite bien un paragraphe à elle seule tant Huntdown représente peut-être ce qu’il se fait de mieux en matière de pixelart « orthodoxe ». C’est sans doute ce qui explique pourquoi Easy Trigger Games a mis tant de temps à livrer la copie finale, tant chaque niveau témoigne d’un soin de plus en plus rare… Car non seulement c’est très beau, mais ça bouge bien, avec une multitude d’effets de particules et de détails d’animation rotoscopée : les torches humaines, le coup de pied au cul au respawn, etc. Il faut d’ailleurs reconnaître que cela nuit parfois à la lisibilité, tant il peut être difficile de repérer une mine ou en ennemi planqué dans le feu de l’action. Et le son n’est pas en reste, bien au contraire, avec là encore plein de petits détails comme les cartouches qui rebondissent au sol, ou l’espèce de ralenti au moment de défoncer une porte. Les musiques sont également très réussies, même si certaines pistes sont peut-être trop recyclées, et mettent incroyablement bien dans l’ambiance avec bien sûr quelques « hommages » appuyés aux années 1980. On pense à certains thèmes du quatrième territoire qui évoquent ceux du Flic de Beverly Hills (1984) ou de K-2000. Et puis outre les nombreux clins d’œil à la pop culture, parfois très discrets (les petites affiches dans le cinéma), il y a beaucoup d’humour en particulier dans les répliques, étonnamment nombreuses de la part des chasseurs de primes – cela pourra d’ailleurs motiver certains à refaire le jeu avec chacun d’eux – comme de leurs cibles. Mais de là à carrément investir dans la future borne d’arcade dédiée… Faut voir, elle coûte combien ?

Verdict : Bénéficiant d’une réalisation somptueuse, d’une ambiance géniale et d’un gameplay en acier trempé, Huntdown s’impose sans mal comme la nouvelle référence du stalk and gun.

110 hbpm

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