Aperçu de l’Astro City Mini

Astro City Mini

Sortie en décembre au Japon, l’Astro City Mini a ainsi été la dernière mini machine d’une année difficile mais particulièrement riche en consoles rétro – nous avons d’ailleurs déjà testé l’Evercade et la PC Engine mini. Toutefois, la mini borne de SEGA offre une proposition assez unique en son genre, et pas seulement pour son apparence la rapprochant de la Neo·Geo Mini… Rappelant que l’éditeur a avant tout été le roi de l’arcade, la machine reprend les traits de sa borne générique la plus populaire, vendue à plus de 500 000 exemplaires dans le monde mais, quitte à être un peu anachronique, les trente-sept jeux inclus (liste en fin d’article) offre un panorama du catalogue SEGA davantage tourné vers le passé – la société a fêté ses soixante ans en 2020, après tout ! L’Astro City Mini est-elle à la hauteur de ce bel héritage ? C’est ce que nous allons voir…

Un beau cadeau de Noël

À l’instar de la plupart des produits japonais, l’emballage est extrêmement compact comme on le voit dans la photo ci-dessus, au point d’ailleurs que les boîtes des manettes se révèlent d’ailleurs délicates à ouvrir. Le packaging est du reste assez sobre, avec seulement un échantillon de captures d’écran des jeux inclus, collant bien à l’esprit d’une machine à l’origine destinée aux professionnels plus qu’au grand public. Contrairement à la Neo·Geo Mini, le câble HDMI est fourni et totalement standard – premier indice rassurant que SEGA a moins honte du résultat lorsque l’on connecte l’Astro City Mini à un écran de TV… Le câble d’alimentation micro USB est lui aussi fourni mais, comme c’est hélas devenu la norme, sans embout. On ne lui reprochera certes pas l’absence habituelle de batterie (ce qui lui permet au moins de voyager par avion et d’arriver plus vite à l’import), mais le souci est que cette mini borne, un peu plus évoluée qu’une bonne partie de la concurrence, semble consommer un peu plus et ne pourra pas toujours être alimentée par le port USB de votre téléviseur. Il faudra donc se munir d’une prise murale – et d’une bonne, parce que j’ai d’abord utilisé celle d’une tablette bon marché (offerte avec un abonnement, vous voyez le genre) et la borne rebootait à chaque partie de Crack Down (1989)…

Borne à sensations

Niveau hardware, on n’est pas loin du sans faute. La machine recrée l’Astro City de 1993 assez fidèlement au 1:6, et va jusqu’à employer les mêmes matériaux. Elle est donc robuste tout en offrant un luxe de détails, comme la barre verte qui s’allume réellement au-dessus de l’écran, et sous les hauts parleurs eux aussi fonctionnels. Les puristes pourront même aller plus loin dans l’authenticité avec le Game Center Style Kit vendu séparément et contenant un socle, un (mini) tabouret, le panneau indiquant le jeu et une planche de stickers… Mais même sans ces ajouts, la machine n’est pas si petite et d’ailleurs un peu plus grande que la Neo·Geo Mini. Son écran de 4″ n’est en revanche pas forcément plus grand car hélas 16/9, mais il affiche une résolution supérieure de 800×480. Bien entendu, la principale différence avec la borne d’origine est un unique panneau de contrôle, qui n’est heureusement pas à l’échelle. Mais dans le même souci d’authenticité, c’est du matériel de qualité avec des microswitches pour le stick comme les boutons, qui présentent un positionnement plus classique. On pourra cela dit discuter la pertinence d’avoir reproduit les six boutons alors que les jeux inclus (pour la grande majorité antérieurs à l’Astro City) les exploitent assez peu, hormis un tir automatique bienvenu sur certains shoots. Enfin, comme elle est plus grosse qu’une Neo·Geo Mini, il semble moins possible de la tenir comme une manette (à moins d’avoir de grosses mains) et mieux vaut la poser comme une vraie borne…

Astro City Mini Arcade Stick

Sans doute pour préserver au mieux les apparences là encore, toutes les connectiques sont au dos du meuble avec l’interrupteur. Outre les connectiques HDMI et micro USB, on trouve une prise jack et deux ports USB pour les manettes (étiquetés clairement J1 et J2). Heureusement, les câbles des manettes sont plutôt longs et cela ne gêne donc pas de les brancher à l’arrière. Vendues séparément, elles cherchent là encore à reproduire autant que possible le panneau de contrôle d’une borne, d’où un design hélas un peu anguleux… Les boutons sont agréables et les deux du centre, jaunes (Credit et Start), mieux placés que sur la borne. Mais, bien que les boutons A, B et C soient étonnamment sur la ligne du haut, ce sont plutôt ceux du bas (D, E et F) qui sont utilisés. Or la position excentrée du F, qui sert moins souvent cela dit, pourrait causer des crispations à la longue… La déception vient plutôt du pad directionnel cependant, un peu en relief bizarrement et qui semble surtout moins précis que celui d’une manette Mega Drive. À ce sujet, hormis le contrôleur officiel, seul le pad six boutons de la Mega Drive Mini est compatible (la touche Mode remplaçant Credit), et on vous le recommande donc car il se montre un peu plus confortable.

L’arcade à la maison ?

Côté software, c’est tout de suite moins authentique, mais c’est globalement très satisfaisant. En version nomade, l’écran se révèle aussi net que celui de la Neo·Geo Mini, visible sous tous les angles. Mais il offre encore une fois une résolution bien supérieure de 800×480 pour s’adapter à une plus grande variété de hardware, du System 1 (1983) de Flicky (1984) au Model 1 (1992) de Virtua Fighter (1993), en passant par la haute résolution de Crack Down (1989) et de Gain Ground (1988), ce dernier étant en outre en mode TATE, à la verticale. Cela rend d’ailleurs le choix d’un écran 16/9 encore plus curieux et, en dehors de l’interface, les jeux présenteront des bandes noires à moins d’opter pour l’un des deux fonds d’écran. Si vous connectez l’Astro City Mini a un téléviseur, commencez par baisser le son pour préserver vos oreilles… Vos yeux vont eux moins souffrir qu’avec la Neo·Geo Mini, heureusement, mais upscaler des résolutions très variées n’a pas été sans heurt ; le résultat reste très correct malgré un effet d’ondulation plus visible sur les (rares) scrollings verticaux, dans Sonic Boom (1987) surtout. Comme détaillé aussi dans la vidéo ci-dessous, le framerate est quasiment parfait hormis dans Virtua Fighter (ici présenté en HD s’il-vous-plaît) mais pas durant les combats. On ne trouve pas non plus les (légers) retards de son de la Mega Drive Mini et de la PC Engine mini, et l’input lag est vraiment négligeable – à moins de connaître par cœur les originaux, peut-être. Comme on le verra lorsque l’on détaillera les options, l’aspect le plus décevant de la machine est le manque de réglages. Or à cause de l’affichage en 720p j’imagine, une partie de l’écran est mangée sur les deux téléviseurs HD testés…

Une ludothèque anachronique

La sélection de jeux est toujours plus difficile à juger, car davantage subjective et par définition inégale – et oui, on pouvait bien entendu en mettre plus. En outre, l’Astro City Mini se démarque d’emblée des autres mini machines car elle est centrée sur les jeux d’arcade, parfois plus méconnus en l’absence de portages sur consoles (Arabian Fight et Golden Axe: The Revenge of Death Adder), ou dont les adaptations ne sont pas à la hauteur de l’original (Virtua Fighter), ou encore qui ont été peu réédités (Shinobi). En un sens, on a peut-être moins d’attente que dans le cas d’une Mega Drive Mini ou d’une Mini Super NES, dont les ludothèques étaient davantage prévisibles. Cela dit, comme on l’a déjà suggéré, il y a encore ici une dichotomie entre le contenant et le contenu. Elle était encore plus flagrante pour le Game & Watch: Super Mario Bros. et aussi présente, mais plus subtilement, pour la Neo·Geo Mini qui avait l’aspect d’une borne MVS (surtout au Japon) mais des jeux AES. En tant que borne générique, l’Astro City n’avait du reste pas accueilli que des jeux SEGA, loin de là, et pas que des nouveautés non plus mais, sur les trente-six jeux inclus – liste complète en fin d’article, Dottori Kun étant un cas particulier abordé ci-dessous –, trente-et-un (soit 86%) sont sortis avant 1993, donc avant la borne en question !

Même en supposant que les hardware ultérieurs auraient été plus difficiles à émuler, on aurait aimé voir davantage de jeux Model 1 en particulier. Et c’est d’autant plus étrange que si l’on retrouve ici pas moins de dix rééditions SEGA AGES vues ces dernières années sur Switch, il en manque quelques-unes, Out Run (1986) et Virtua Racing (1992) constituant les absences les plus manifestes. À l’inverse, quand l’OVNI Gain Ground (1988) avait été réédité sur la console de Nintendo, j’ai pensé que tant qu’à faire, M2 allait proposer d’autres jeux en haute résolution. Or, à ma grande déception, Crack Down (1989), sans doute l’unique représentant du genre stalk and gun vu du dessus, n’a pas rejoint la gamme… Mais il est inclus dans l’Astro City Mini. De manière générale, elle a le mérite de faire (re)découvrir des perles rares comme Golden Axe: The Revenge of Death Adder (1992) surtout, même si d’autres titres comme le laborieux My Hero (1985), ou les spectaculaires mais pas très amusants Arabian Fight et Dark Edge (1992), ne rassasieront sans doute que la curiosité des fans de SEGA… Et puis Sonic Boom (1987, aucun lien), peu lisible sur l’écran de la borne, et Scramble Spirits (1988) rappelleront que le shoot ’em up n’est pas vraiment la spécialité de l’éditeur, même s’ils sont corrects. Et si l’on peut comprendre que les concepteurs aient voulu éviter les titres à bornes dédiées comme Out Run (encore une fois) ou After Burner (1987), ces oublis seraient mieux passés si l’on n’avait pas trois Columns et deux Puyo Puyo

Privé de (dip) Switch

Mais comme il s’agit de jeux d’arcade, il ne faut pas perdre de vue qu’ils avaient été tous conçus pour faire dépenser de l’argent aux joueurs… Alors certes, on dispose de crédits infinis, mais certains classiques comme Alien Syndrome (1987) renvoient à l’écran-titre qu’il nous en reste ou pas, quand d’autres sont si difficiles qu’on ne trouvera pas forcément le courage de remettre une pièce virtuelle. Enfin, Wonder Boy in Monster Land (1987) serait sans doute plus abordable avec des textes en anglais… Ce qui nous ramène au principal défaut de l’Astro City Mini : le manque d’options. Déjà, si l’on peut régler la langue en anglais au premier allumage, ce n’est valable que pour l’interface mais pas les jeux qui ne contiennent heureusement, pour la grande majorité d’entre eux, que peu de textes en japonais. Ceux-ci sont présentés dans un ordre chronologique judicieux même si Virtua Fighter (1993), l’un des derniers, est initialement sélectionné. On change de jeu avec haut et bas, tandis que gauche ou droite permet de regarder une sélection de captures d’écran – ce ne sont pas les aperçus des sauvegardes, dont la présence est indiquée par de simples cases cochées au-dessus. À noter que, pour certains jeux seulement, en appuyant sur F, on peut écouter un de leurs thèmes musicaux, mais il s’interrompt dès qu’on passe à un autre titre.

Toujours de ce menu principal (et seulement depuis celui-ci hélas), on accède aux options globales avec le bouton Credit. Mais on trouve le minimum syndical avec la luminosité de l’écran intégré (cinq niveaux), le volume des hauts parleurs de la borne (cinq degrés aussi), la possibilité ou non d’activer un filtre CRT plutôt loupé, et le choix entre deux fonds d’écran au lieu des bandes noires… Et c’est tout, ce qui signifie qu’on ne peut pas régler le format de l’image hélas, comme on le sous-entendait plus haut. Au lancement de chaque jeu, on a droit à un rappel bienvenu des commandes (aussi disponible sur l’écran de pause), et au choix entre une nouvelle partie ou les deux sauvegardes – là encore le minimum syndical même si les crédits infinis compensent en partie. Surtout que les scores, eux, ne sont pas mémorisés, et disparaissent au moindre Reset… Ce qui est vraiment un comble pour des jeux d’arcade. Et surtout, le menu de pause, accessible en appuyant sur Credit et Start en même temps (pas génial mais toujours mieux que maintenir Start cinq secondes comme sur Mega Drive Mini), ne donne accès qu’aux sauvegardes et ne propose donc pas les dip switches typiques de l’arcade. C’est quand même fort dommage lorsque l’on compare aux assez nombreuses options offertes par les rééditions SEGA AGES, où l’on trouve précisément dix de ces classiques, ou à ce que propose également M2 sur ses mini consoles.

La mini-borne des SEGA-fans

Il est difficile de comparer une proposition si spécifique (et d’ailleurs limitée au Japon) aux autres mini consoles, dont l’attrait est avant tout subjectif, selon les jeux et les machines qu’on a connues dans notre jeunesse. Sur un plan très personnel, il se trouve que l’Astro City Mini offre six jeux de mes game designers de SEGA préférés, Yutaka Sugano (Alex Kidd: The Lost Stars mais surtout Shinobi et Crack Down) et Makoto Uchida (Altered Beast et les deux Golden Axe), mais je sais que tout le monde ne partage pas mes goûts – loin de là… Donc de manière plus objective, la machine est clairement dans le haut du panier sur le plan purement technique, en termes de qualité de fabrication comme de l’émulation, et pèche surtout par le manque d’options proposées, en matière d’image comme de gameplay. Et puis l’Astro City Mini n’a évidemment pas l’attrait grand public d’une Mega Drive Mini mais, à l’instar de la PC Engine mini par exemple, elle bénéficie d’un caractère plus exotique qui la rendra surtout indispensable aux plus curieux d’entre vous, ceux qui ne s’adonnent pas tant au retrogaming par nostalgie que par intérêt pour l’histoire du jeu vidéo.

Un grand merci à tous ceux qui nous soutiennent sur Tipeee.


Liste des 37 jeux inclus (ordre chronologique) :

  1. Flicky (1984)
  2. Ninja Princess/The Ninja (1985)
  3. Seishun Scandal/My Hero (1985)
  4. Space Harrier (1985)
  5. Fantasy Zone (1986)
  6. Wonder Boy (1986)
  7. Quartet 2 (1986)
  8. Alex Kidd: The Lost Stars (1986)
  9. Alien Syndrome (1987)
  10. Wonder Boy in Monster Land (1987)
  11. Shinobi (1987)
  12. Sonic Boom (1987)
  13. Altered Beast (1988)
  14. Scramble Spirits (1988)
  15. Wonder Boy III: Monster Lair (1988)
  16. Gain Ground (1988)
  17. Crack Down (1989)
  18. Golden Axe (1989)
  19. ESWAT (1989)
  20. Shadow Dancer (1989)
  21. Alien Storm (1990)
  22. Columns (1990)
  23. Bonanza Bros. (1990)
  24. Columns II: The Voyage Through Time (1990)
  25. Thunder Force AC (1990)
  26. Rad Mobile (1991)
  27. Cotton (1991)
  28. Arabian Fight (1992)
  29. Golden Axe: The Revenge of Death Adder (1992)
  30. Puyo Puyo (1992)
  31. Dark Edge (1992)
  32. Puzzle & Action: Tant-R (1993)
  33. Virtua Fighter (1993)
  34. Stack Columns (1994)
  35. Puzzle & Action: Ichidant-R (1994)
  36. Puyo Puyo Tsū (1994)
  37. Dottori Kun (voir l’encart dédié)

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