OKINAWA RUSH
Windows, Xbox, PlayStation 4, Switch
Catégorie : action/plateforme
Joueurs : 1-2
Développeur : Soikaikan
Éditeur : PixelHeart / Just For Games
Date de sortie : 21/10/2021
Prix : 19,99 €
Site Officiel : http://www.okrush.co.uk/
(testé sur Switch, copie fournie par l’éditeur)
Okinawa Rush fait partie de ces trop nombreux jeux néorétro qui, après nous avoir tapé dans l’œil à l’automne 2016 puis fait l’objet d’une campagne Kickstarter réussie l’année suivante, se sont faits terriblement discrets. Lorsqu’il est enfin sorti à l’automne dernier, cela faisait près d’un an que les précommandes des éditions physiques du jeu de Sokaikan avait été ouvertes chez PixelHeart… Ce qui n’enlève heureusement rien à ses qualités, mais renforce nécessairement les attentes qu’on a envers celui-ci. D’ailleurs, même si elle témoignait aussi de qualités indéniables, la démo que je vous conseille encore une fois largement de télécharger avant d’investir m’avait en partie refroidi. Mais au-delà de certains points un peu plus objectifs sur lesquels je vais bien sûr revenir, l’appréciation du jeu reposera fortement à mon avis sur votre nostalgie pour des classiques à l’ambiance asiatique mais de conception résolument européenne, comme c’est le cas de ses influences les plus évidentes, International Karate (1986) et The First Samurai (1991) en tête.
Pour être honnête, ma première impression du jeu final n’a pas été très positive non plus, entre une configuration un peu laborieuse obligeant à se créer un profil avec une icône lilliputienne (surtout sur l’écran d’une Switch), toute en anglais alors que l’ensemble peut être basculé par la suite en français (et la traduction est plutôt bonne), et une validation qui se fait par défaut avec le bouton du bas… On peut cependant le changer, et c’est même préférable car il s’agit du bouton pour attaquer et je suis habitué à utiliser celui de gauche dans ce genre de jeu… En outre, Okinawa Rush arbore par défaut un filtre CRT trop prononcé à mon goût et que l’on peut uniquement désactiver, hélas. On a sinon le choix entre les modes Arcade et Histoire, sachant que le second peut également être joué à deux en coopération, ce qui est tout à fait louable. En revanche, les niveaux s’enchaîneront sans laisser la possibilité de revenir au menu et notamment passer par le dojo proposant des mini-jeux pour améliorer ses capacités. Le didacticiel des coups booste l’attaque, tandis que la défense s’augmente via une épreuve d’esquive de poteaux aux contrôles peu intuitifs ; je trouve en tout cas le défi similaire dédié à la vitesse mieux fichu. Enfin, le mini-jeu de danse un peu étrange à base de chorégraphies de kata ne donne que de l’argent semble-t-il.
En outre, le dojo où se déroulent ces épreuves est personnalisable en mode feng-shui, et réaliser les bons alignements d’objets achetés avec de l’argent permettra encore de booster les stats, ce qui plaira sans doute aux amateurs de RPG mais déboussolera ceux qui s’attendaient à un gameplay plus arcade… Le premier niveau débute après un prologue (facultatif) où l’on incarne la femme du protagoniste pour faire de la cueillette, ce qui permet de se familiariser davantage avec les contrôles. Ces derniers sont étonnamment simples puisqu’ils ne reposent que sur deux boutons, un pour le saut, un pour l’attaque, sachant qu’un troisième permet de combiner les deux plus facilement. Mais il ne faut pas croire pour autant que la palette de mouvements est limitée ; c’est même le contraire, et comme la plupart des combinaisons marchent, on peut sortir des trucs assez fous en faisant un peu n’importe quoi ! Et mine de rien, il faut avouer qu’on retrouve le côté assez grisant d’un International Karate+ (1987) en vitesse max (touche F9). Néanmoins, si on se surprendra souvent à se sortir d’une situation délicate en appuyant sur tous les boutons, il arrivera à l’inverse qu’on meurt en l’espace de quelques secondes, pris en sandwich entre des dizaines d’ennemis. Car la parade s’effectue avec la direction de l’attaque, ce que l’on fera donc souvent sans le vouloir, heureusement, même si ce ne sera pas naturel pour tout le monde.
Et puis il y a quelques pièges qui tuent instantanément, ainsi que les chutes dans le vide, pas toujours simples à éviter avec des sauts horriblement lunaires, qui vont beaucoup plus haut (même sans ajouter la direction) que loin, et l’impossibilité de regarder autour de soi… Tout ça combiné avec des collisions parfois étranges, ou plutôt un « magnétisme » excessif. Néanmoins, le pompon revient clairement à certains ennemis spécialistes de l’antijeu, en particulier les scorpions géants ; si vous vous retrouvez entre deux d’entre eux, vous allez probablement retourner à un checkpoint très bientôt. Cela dit, les vies sont distribuées généreusement, et il y en as pas mal cachées, mais cela ressemble un peu à une manière de compenser une difficulté mal réglée. Même la perte d’un crédit vous ramène au dernier chaudron enflammé et ne vous pénalisera qu’au niveau des points engrangés. D’ailleurs, il est dommage qu’on ne puisse pas réactiver les checkpoints compte tenu de la non linéarité du level design, et on pourra ainsi réapparaître très loin bien que, là encore, les ennemis ne reviennent pas et les boss ne se régénèrent pas non plus !
Néanmoins, il faut reconnaitre que c’est en partie ce côté foutraque qui confère à Okinawa Rush son charme tout européen, sa patte « brochette bœuf-fromage ». Comme dans The First Samurai (1991) et dans pas mal de productions britanniques de la même période, le level design croule sous les objets interchangeables à ramasser, qui ne font que monter le score ou donner quelques points de vie chacun… Les mécaniques de gameplay sont également empilées dans un élan de générosité un peu candide, avec des otages à libérer, de nombreux secrets parfois bien ésotériques – à quoi servent ces salles dans lesquelles le temps semble ralenti ? – ou encore une série de combos à réaliser au début de chaque niveau, qui a le mérite de nous les remettre en tête, il est vrai. Il faut dire aussi que l’aventure n’est composée que de cinq niveaux, ce qui explique qu’ils soient si vastes et qu’on comprenne difficilement dans quel ordre les explorer, sachant qu’on ne pourra hélas pas toujours revenir sur ses pas. La maison de la fin du troisième, avec ses multiples portes à l’arrière-plan, m’a franchement déboussolé mais j’ai davantage apprécié le dernier malgré son système de clés assez particulier. Et même si les boss ne reprennent pas leur énergie quand on perd une vie (là encore le signe d’une concession à une difficulté aléatoire), certains affrontements sont bien laborieux comme celui contre les trois petits vieux identiques à la fin du troisième stage.
Et la réalisation est tout à fait dans le ton de cet esprit gaijin. Par exemple, les musiques sont réellement marquantes, mais d’autant plus impressionnantes qu’elles sont assez inattendues, plus dans l’ambiance hip-hop d’un délire référentiel de Quentin Tarantino que d’un authentique film de kungfu. Graphiquement, c’est globalement très réussi comme on peut le voir dans les captures d’écran, quoique parfois inégal avec quelques animations un peu rigides par-ci par-là. Mais ce sont plutôt les illustrations des cinématiques ou des portraits lors des dialogues qui jurent avec le reste je trouve, trahissant là encore assez souvent l’œuvre d’un apprenti mangaka et non d’un pixelartiste japonais de l’âge d’or de la 2D. Il n’est néanmoins pas interdit d’être charmé par ce style, loin de là, et surtout cela n’empêche pas Okinawa Rush d’être malgré tout fort sympathique, à défaut d’être inoubliable. Et puis je tiens à rappeler que je n’ai pas eu l’occasion de tester le mode coopération à deux joueurs, qui doit être sacrément fendard même si j’imagine assez mal comment l’éloignement des personnages est géré compte tenu de la hauteur des sauts et la vitesse des déplacements… N’hésitez pas à en parler en commentaire si vous l’avez essayé.
Verdict : Davantage influencé par les productions Amiga de ses compatriotes que par les classiques japonais, Okinawa Rush est souvent jubilatoire mais joyeusement bordélique.
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