MOMODORA: REVERIE UNDER THE MOONLIGHT
Plateforme : Windows Catégorie : Metroidvania Joueurs : 1 Développeur : Bombservice | Éditeur : Playism Date de sortie : 04/03/2016 Prix : 9,99 € Site Officiel : http://bombservice.com/ |
Hormis le freeware Bunny Swordmaster Story réalisé en cinq jours en 2011, et d’ailleurs pas si différent, Bombservice ne s’est consacré qu’à une unique série, Momodora, qui compte déjà quatre titres depuis 2010. Composé aujourd’hui de quatre développeurs mené par le très secret rdein, le studio qui se finance via une campagne Patreon a donc passé six ans à affiner le même concept à chaque itération. La saga est déjà passée au niveau supérieur en 2014 avec Momodora III, le premier à avoir été distribué commercialement, et elle franchit une nouvelle étape avec ce quatrième épisode (une prequel comme on l’indiquait à sa sortie) qui offre une réalisation encore plus soignée et un gameplay enrichi. En effet, dès le départ orientée vers l’action/plateformes, la série s’est peu à peu teintée d’aventure et, si le terme est souvent galvaudé, on a réellement affaire ici à un Metroidvania pur jus ; ce n’est pas parce que la carte emblématique est rouge au lieu d’être bleue qu’on s’y trompera ! L’ensemble est toutefois plus « Vania » que Metroid, avec des équipements actifs et passifs, des changements de statuts, etc.
On retrouve aussi les classiques points de sauvegardes qui régénèrent et font office à terme de téléporteurs. Néanmoins, le gameplay est un peu plus axé sur le combat qu’ailleurs, avec un feeling général qui rappelle énormément Cave Story (la référence ultime du développeur), aussi bien pour ses ennemis kawaii que pour ses PNJ énigmatiques et ses effets de particules, mais aussi pour sa difficulté assez relevée… Comme on le répète chaque fois, les premiers pas sont souvent délicats dans les jeux du genre, puisque l’on débute avec un équipement et une jauge d’énergie au minimum, mais il faut savoir que rdein a aussi pas mal joué à Dark Souls ces dernières années ! Ainsi, les adversaires ont beau de ne pas payer de mine comme on le disait, ils se révèlent franchement sournois. La première petite fille équipée d’un bouclier que l’on croise est facile à vaincre, d’autant que cela sert de didacticiel pour les roulades, mais étrangement, par la suite, ces petites pestes se retournent instantanément ! Et il est également rare de rencontrer, dès le début d’un jeu, des petites filles qui vous balancent des grenades empoisonnées…
Pour compenser cela, on dispose très rapidement de baies pour se soigner et qu’il ne faudra pas hésiter à utiliser bien qu’un compteur à côté de l’icône affiche « 3 ». En effet, il s’agit en réalité du nombre maximal d’utilisations avant la prochaine sauvegarde, qui régénère tous les objets et sorts en quantité limitée. En revanche, on pourra augmenter ce nombre en ramassant d’autres baies au cours de l’aventure. Mais cela ne dispense pas de rester prudent, d’autant que les pics tuent instantanément, et que les points de sauvegarde sont parfois plus éloignés qu’ils ne le paraissent sur la carte… Avec un peu de patience et d’observation, puisque pas mal d’ennemis aiment bien se confondre avec le décor, on parviendra tout de même à progresser. Il faut noter d’ailleurs que pour un Metroidvania, on débute l’aventure assez bien équipé, avec un double-saut et une roulade disponibles d’emblée. Côté arsenal, on démarre avec une feuille (d’érable) plus puissante qu’elle n’en a l’air au corps à corps, et un arc pour attaquer à distance, logiquement moins efficace mais dont on peut charger l’attaque pour tirer plusieurs flèches d’un coup.
Momodora: Reverie Under the Moonlight incite aussi beaucoup à avancer à tâtons parce qu’il regorge de passages secrets qui ne s’ouvrent parfois qu’en donnant un coup de feuille dans le mur… Cela dit, Bombservice se montre une nouvelle fois cruel avec des extensions de vie qui ne régénèrent pas, comme le veut pourtant la tradition du genre. Mais surtout, l’allongement de la jauge est bien léger comparé aux énormes tronçons que vous font perdre les attaques des ennemis ! Les développeurs ont sans doute fait ce choix pour en disséminer davantage sans obliger le joueur à en réunir des fragments façon Zelda, mais il ne sont pas forcément bien répartis, car on en trouve étrangement beaucoup dans l’avant-dernière zone, quand c’est sans doute un peu tard pour nous faciliter la tâche. De toute façon, l’aventure est relativement linéaire et n’incite au backtracking que pour récupérer des objets facultatifs. C’est particulièrement frappant au début, où il est même impossible de revenir sur ses pas faute d’avoir obtenu les bonnes capacités. On ne pourra donc pas beaucoup grinder avant d’affronter les boss bien coriaces…
Le premier d’entre eux est déjà bien vachard, avec des attaques qui vident les deux tiers de votre jauge de santé, même si on peut l’avoir à l’usure, en gardant ses distances grâce à l’arc… Il faut toutefois savoir que les boss ne confèrent d’items que si on parvient à les vaincre sans perdre d’énergie, ce qui ne sera pas à la portée de beaucoup de joueurs, à part pour le premier, peut-être. Heureusement, ces objets sont totalement optionnels, et constituent plutôt des équipements de buff qui peuvent faciliter l’aventure – mais en a-t-on vraiment besoin si on peut terrasser un boss sans se faire toucher ? Hormis la transformation en chat qui s’obtient à un moment donné de l’histoire, les nouvelles capacités se gagnent ici via quatre fragments d’une crête, en général gardés par un boss cela dit, qui réunis donnent accès à l’avant-dernière zone précédemment évoquée. Bien qu’identiques sur le plan visuel, ces fragments confèrent donc des pouvoirs différents comme améliorer l’arc, ajouter un dash aérien ou permettre la téléportation depuis n’importe quelle sauvegarde, mais pas vers n’importe quelle sauvegarde cependant.
Il n’y a donc réellement que trois capacités qui donnent accès à de nouvelles zones, et Momodora: Reverie Under the Moonlight n’est donc pas un Metroidvania à la durée de vie très longue, même si on a reproché la même chose au modèle du genre, Super Metroid, à sa sortie ! Ma sauvegarde affichait près de quatre heures à la fin de l’aventure, mais je n’avais pas déniché tous les secrets, et ce temps ne tient pas compte, comme d’habitude, des échecs. Il faudra sans doute une heure de plus pour finir le titre à 100%, du moins dans le mode de difficulté le moins élevé. Les insectes d’ivoire, s’ils ne servent qu’à gagner de l’argent, sont notamment bien planqués. Forcément, jouer dans le second mode de difficulté donnera beaucoup plus de challenge, mais il faudra beaucoup s’accrocher d’autant que, comme on le disait, le grinding n’apporte pas grand-chose – encore faut-il avoir des choses à acheter avec tout cet argent ! – et que les extensions de vie ne sont pas toutes accessibles d’emblée, bien entendu. D’un autre côté, il est vexant de se résoudre au mode facile, destiné aux « non-initiés aux jeux vidéo » !
Et le problème, c’est que dans ce mode, les ennemis ne sont pas moins agressifs, ni les chutes moins mortelles. La seule différence est que l’on débute avec sa jauge de santé au maximum, ce qui retire hélas tout le plaisir de dénicher les extensions, et ce qui est rendu en outre un peu inutile par la présence de deux pièces d’équipement passif fournies d’emblée. L’une booste la défense et rend ainsi le jeu effectivement plus abordable, tandis que l’autre fait remonter (assez lentement cela dit) la jauge de santé. Or on peut bien sûr faire le choix de ne pas les porter, mais on ne peut pas réduire sa jauge d’énergie… Ainsi, on peut hélas passer en force dans la plupart des situations, notamment contre les boss, et l’aventure perd une grande partie de son sel. Et on retrouve aussi ce problème d’équilibrage avec les secrets, dont certains sont trop bien cachés pour être trouvés sans aide, mais une fois que l’on obtient (assez vite en plus) l’équipement qui indique la présence de l’un d’eux dès qu’on rentre dans la pièce, cela ne pose plus tellement de difficultés. On aurait vraiment préféré un challenge mieux dosé plutôt que bridé de la sorte.
Une possibilité (peut-être) plus satisfaisante consiste à faire tout d’abord l’aventure en ligne droite en facile, et d’attendre le New Game + pour approfondir. On redémarre en effet avec tout son équipement (sauf quelques objets clés) et la carte explorée au même point, et ce sera donc l’occasion de dénicher les derniers secrets, et pourquoi pas d’essayer de battre les boss sans perdre d’énergie ; c’est déjà plus envisageable avec un arsenal plus performant. Toutefois, le placement des ennemis est différent et ils causent plus de dommages, puisque cette seconde traversée se base sur le mode de difficulté le plus élevé – on ne peut d’ailleurs pas le régler. Mais si l’on insiste à ce point sur ce dosage discutable du challenge, c’est parce que c’est la seule chose que l’on peut reprocher à Momodora: Reverie Under the Moonlight, et on n’est d’ailleurs pas les seuls ; ce sujet revient souvent dans les interviews du développeur, qui prétend avoir pourtant cherché à rendre le jeu accessible au plus grand nombre. Et sur ce point, il a bénéficié du soutien des fans pour avoir des traductions (y compris en français) très soignées.
De manière générale, l’enrobage est très réussi pour un jeu indé, avec des contrôles bien pensés même si les manettes Xbox sont les seules à être reconnues – il faudra utiliser DS4Windows pour employer celle de la PlayStation 4. Côté ergonomie, on apprécie la possibilité d’afficher la carte à la volée en maintenant Back/Share, en conjonction avec le stick pour la déplacer, pour ne pas avoir à ouvrir le menu. On aurait toutefois apprécié la présence d’une mini-map. Les contrôles sont aussi assez souples, l’utilisation des objets répond bien, et on peut par exemple (double) sauter avant ou après un dash aérien. Seule la charge de l’arc, même améliorée, demeure un peu trop longue pour être très efficace contre les boss notamment, d’autant qu’elle peut bien sûr être interrompue par une attaque ennemie. On peut en revanche sauter ou se baisser tout en chargeant, ce qui est bien commode. Et il faut saluer l’excellence de la réalisation, en particulier dans le détail des animations, même si le style visuel moe assumé, de nouveau dans l’esprit d’un Cave Story, ne sera bien évidemment pas du goût de chacun.
Verdict : Encore plus riche et beau que ses prédécesseurs, Momodora: Reverie Under the Moonlight marque le point d’orgue de la série, en dépit d’un dosage discutable de sa difficulté.