CHRONIQUE : La techno qui a failli tuer l’industrie de l’arcade ! (2/2)

Un lecteur de CD-ROM

La techno qui a failli tuer l’industrie de l’arcade !

(seconde partie)

Par Kevin Williams, publié sur Arcade Heroes le 13 février 2023
Traduit de l’anglais par sseb22

Kevin Williams, spécialiste de l’industrie, continue son dossier sur la montée et la chute de technologie dans l’industrie du divertissement et en particulier en ce qui concerne les médias de stockage optique. Ce sont les années 1990 et c’est l’heure du LaserDisc… et du CD !

Il est assez difficile d’imaginer que quelqu’un soit vraiment attiré par l’arrivée d’une technologie nouvelle dans le domaine du stockage optique après avoir souffert des vicissitudes lors de l’engouement pour le LaserDisc en 1983 mais il faut se rappeler qu’à la fin des années 1980, peu de cadres de l’industrie avaient beaucoup d’ancienneté dans le secteur. Nous avons traité l’implosion de la scène LaserDisc ici pour ceux qui souhaiteraient rattraper l’histoire.

L’innovation était toujours le mot d’ordre dans le marché du divertissement mais les frais liés à une nouvelle technologie devenaient un sujet de plus en plus préoccupant pour ce secteur de par l’explosion des coûts de développement du jeu vidéo. Les images de synthèse étaient de plus en plus populaires et les opérateurs [de l’arcade] étaient toujours à la recherche d’une piste pour contrer l’exode de leur audience qui jouait toujours plus chez eux, le tout sans se ruiner. Malgré les problèmes, le LaserDisc était toujours considéré comme une plateforme viable et maintenant que la technologie avait quelques années derrière elle, elle était prête à reprendre une part du marché.

Les développements de jeu sur LaserDisc étaient toujours actifs même si la plupart d’entre eux tenaient plus du râle d’agonie de la vague précédente. Au Japon, Universal persévérait à la suite du lancement de leur plateforme standardisée Universal System 1 et tenta de lancer Captain Zapp en 1985. En démonstration lors d’un salon professionnel cette même année, le jeu n’est jamais sorti et Universal (la société de jeux d’arcade, pas le studio de production de films) fera faillite peu de temps plus tard. Les aspirations de Data East en matière de LaserDisc faisaient aussi partie des restes du premier engouement général pour cette technologie. Celles-là n’accoucheront que de trois jeux dont Road Blaster (1985) est le dernier. Ils évitèrent la banqueroute mais de peu.

Flyers de Captain Zapp et Road Blaster

Il semblait que les LaserDiscs étaient de l’histoire ancienne mais cinq ans plus tard, une nouvelle société était prête à se faire la championne de la technologie.

American Laser Games (ALG) a été fondée après l’effondrement de la scène LaserDisc en arcade. Utilisant leur expérience dans les systèmes commerciaux d’entraînement de la police au tir de combat, ils créèrent un jeu-film de tir avec des cowboys appelé Mad Dog McCree. Sorti en 1990, ce jeu utilisait un lecteur de LaserDisc Sony de nouvelle génération (LDP-1450) connecté à une carte-mère d’Amiga 500 par Commodore (le même type d’Amiga utilisé par Arcadia Systems pour une poignée de jeux non LaserDisc quelques années auparavant). Ce film interactif de cowboy fun et captivant avait réussi à comprendre que les éléments clés du succès pour un jeu d’arcade en FMV résidaient moins dans l’utilisation d’un joystick que dans celle d’un pistolet optique. Et même si Mad Dog McCree n’avait pas un budget aussi élevé que les précédents jeux-films sur LaserDisc, son charme ne laissa personne indifférent.

En 1991, la borne était en haut des charts arcade (notamment ceux de Replay) et ALG en vendait jusqu’à cent par mois. En devenant l’un des titres de l’année avec le plus de succès, Mad Dog changea à lui seul l’opinion de l’industrie sur le jeu LaserDisc. Et les industriels en voulurent donc plus. Il semblait plus que certain que le genre du jeu-film sur LaserDisc allait devenir la nouvelle folie.

Arrêtons-nous quelques instants pour aborder le fait que Mad Dog McCree n’était pas le premier jeu de tir en FMV à l’ambiance western sur le marché. Le concept, et on inclut l’utilisation d’éléments de duels au pistolet, peut remonter à 1974. À cette époque, le constructeur japonais Nintendo se lança dans le divertissement [électromécanique] avec la fabrication de Wild Gunman (à ne pas confondre avec le classique du même nom sur NES datant de 1984) [NdT : voir notre chronique à ce sujet]. Utilisant une borne spéciale, un projecteur de film 16 mm diffusait les séquences d’une vraie pellicule sur un écran. Le joueur devait tirer dessus en utilisant un pistolet optique pour progresser. La façon dont le jeu sautait entre les scènes et l’action était analogue à des quick time events et opérait exactement comme les jeux LaserDisc allaient le faire une décennie plus tard.

Cette machine à proprement parler est même sortie au Japon en 1973 et Nintendo a ensuite contractualisé sa licence à SEGA pour la distribution en Occident. L’énorme taille de la borne d’arcade et le système de jeu complexe et capricieux basé sur du « cinéfilm » ont fait que le titre n’a jamais pu prendre de l’ampleur dans ce marché bourgeonnant. C’était une bizarrerie bien trop en avance sur son temps, basée sur une technologie qui n’était pas assez robuste pour bien fonctionner dans des environnements de divertissement ouverts au public. Mais le temps allait venir.

Flyer de Wild Gunman

Note : Les expériences de jeux-film n’étaient pas exclusives à Nintendo. En 1978, la société de divertissement Kasco (Kansai Seiki Seisakusho Co.) a sorti le jeu The Driver. Il s’agissait d’une borne d’arcade de course basée sur des séquences filmées dans laquelle la capacité du joueur à faire aussi bien que la séquence filmée de conduite sauvage était récompensée.

Revenons aux années 1990. Le succès d’American Laser Games fut comme un électrochoc pour une industrie des jeux d’arcade qui avait renoncé à la technologie des disques optiques plusieurs années auparavant. Cette réapparition soudaine n’a pas échappé à l’industrie japonaise de divertissement. Car même au Japon, Mad Dog, distribué par Capcom, a été une sensation. Les équipes de R&D se mettaient subitement à dépoussiérer des idées pour à nouveau utiliser cette technologie mal aimée.

SEGA allait d’ailleurs signer son retour aux jeux sur LaserDisc avec une plateforme novatrice. Développée en partenariat avec Rick Dyer (créateur de Dragon’s Lair, Space Ace et Thayer’s Quest), ils mirent sur le marché ce qu’ils appelaient « le premier jeu vidéo holographique tridimensionnel du monde » : Time Traveler. Sorti en 1991, le système de jeu sur lequel Time Traveler était basé comprenait une enceinte assez clinquante appelée « Borne de vidéo holographique » même si l’effet 3D n’était pas strictement réalisé par un affichage holographique. Le rendu pseudo-holographique utilisait à la place une variante de l’effet du fantôme de Pepper dans lequel la projection issue d’une télévision combinée à un miroir sphérique permet d’atteindre l’effet holographique. Le matériel du jeu comprenait un lecteur de LaserDisc Sony (LDP-1450) et était censé être compatible avec toute une série de titres.

Flyer de Time Traveler

La borne inhabituelle offrait un demi-cercle devant le joueur dans lequel il y avait l’effet 3D sans avoir besoin de lunettes. Le jeu affichait des acteurs digitalisés et son gameplay était basé sur des Quick Time Events (QTE), comme tous les jeux sur LaserDisc. Le joueur dirigeait un cowboy voyageant dans le temps dans les divers niveaux du jeu. Même si la forme était inédite et novatrice, la plateforme a, en fin de compte, succombé au même travers qui avait déjà frappé tellement de jeux durant la période 1983-1985 : le matériel se révéla peu fiable. Et pourtant, malgré ce problème, SEGA réalisa de bonnes ventes avec ce jeu, leur permettant même d’en créer un second pour cette borne d’arcade, essayant ainsi de rester compétitif dans le flux de jeux de combat chez la concurrence : Holosseum (1992).

L’équipe AM5 de SEGA continua cependant de voir le LaserDisc comme le médium parfait pour véhiculer ses plans dans l’industrie du divertissement. Le développement de la gamme de machines géantes de divertissement « EN-JOINT SPACE » regarda du côté de technologies exotiques et ils lancèrent ainsi leur simulateur interactif pour huit passagers : AS-1. SEGA a également passé un contrat célèbre avec la légende de la musique, Michael Jackson, pour sortir en 1993 AS-1: Scramble Training. Dans ce jeu, la partie des batailles spatiales en images de synthèse était gérée par le LaserDisc tandis que les tirs du joueur et les ennemis étaient générés par un ordinateur embarqué. SEGA aura fourni trois expériences pour ce simulateur mais qui ne connurent que des sorties mineures en dehors du Japon. Il est cependant à noter que son statut devint culte lorsque les vidéos originales de Michael Jackson guidant les utilisateurs ont été découvertes en 2022.

L'AS-1 de SEGA, vu de l'extérieur
L'AS-1 de SEGA, vue de l'intérieur avec l'écran et les fauteuils

Mais SEGA n’était pas seul à explorer l’angle des simulateurs en FMV. Taito avait de son côté sorti son « D3BOS » (Dynamic Direct Dimension Burst Out System) en 1991, deux ans avant SEGA et son AS-1. C’était la réponse de Taito au R360 iconique de SEGA mais avec en plus la possibilité de faire monter deux personnes grâce au fait qu’il offrait des mouvements gyroscopiques à 360° dans une borne complètement fermée. L’aventure était elle aussi générée par le LaserDisc, offrant une expérience en simulateur inversée trépidante, et proposait quatre attractions filmées différentes. Il fut suivi par IDYA, un module de mouvements, en 1992 et Super D3BOS en 1993, tous basés sur la technologie du LaserDisc. L’une de ces expériences (Pyramid Patrol, développée par HighTec Lab) allait d’ailleurs être portée plus tard sur Mega CD (et était aussi compatible avec la plateforme LaserActive de Pioneer). Une borne D3BOS fut d’ailleurs découverte récemment en train de prendre la poussière dans un entrepôt mais il est fort probable qu’il faille un des ingénieurs originels de chez Taito pour la sauver maintenant :

Nous reviendrons à ces simulateurs plus tard mais pour le moment, laissons un peu ces contributions inhabituelles à cette industrie et retournons aux bornes d’arcade. Le succès de Mad Dog signifiait que les opérateurs commencèrent à faire attention à ALG et ils en voulaient plus, et notamment qu’ALG corrige les problèmes que connut le premier jeu. Par exemple, la borne originale à piédestal et rétroprojecteur nécessitait une configuration plus compacte et traditionnelle. C’est ainsi que fut développée une gamme plus économique et pratique, incluant une borne d’arcade « debout » de vingt-cinq pouces lancée en 1992 qui prenait moins de place.

Mais ce que voulaient vraiment les opérateurs, c’était des jeux du même acabit que Mad Dog et maintenant, Atari Games s’était positionné pour faire partie des partenaires d’ALG. Après la sortie de jeux moyens comme Who Shot Johnny Rock et Space Pirates, les deux sociétés retournèrent à la recette éprouvée des cowboys et en développèrent une suite : Mad Dog II – The Lost Gold (1992). Ce jeu offrait ainsi à nouveau de l’action au western mais dans des lieux différents. Cette fois-ci, la borne fut directement proposée à la fois en version borne d’arcade complète ou en kit de mise à niveau pour le premier Mad Dog. Mais il y avait également une autre option qui allait prouver qu’on pouvait obtenir des résultats similaires, voire meilleurs, dans un package plus petit et moins cher.

Cette nouvelle technologie est le « Disque Compact – Mémoire en Lecture Seule » (plus connue sous l’acronyme CD-ROM). Développée conjointement par Sony et Philips et dont le format définitif fut lancé en 1984, ce n’est pas avant les années 1990 que sa disponibilité lui permit d’être compatible avec un déploiement dans l’univers du divertissement. Grâce à des lecteurs relativement peu chers, une fantastique FMV était dès lors accessible dans une meilleure version tout en profitant également pour passer d’un format analogique à un format numérique. Prompt à capitaliser sur une nouvelle technologie, ALG créa un nouveau système basé sur le CD-ROM, offrant une solution rentable pour les opérateurs.

Flyer de Mad Dog II – The Lost Gold

L’une des différences majeures par rapport au LaserDisc était que l’industrie de l’arcade n’était pas la seule à s’intéresser à des systèmes de jeux basés sur la technologie du CD. L’industrie des consoles de jeux, en évolution constante, scrutait également l’opportunité de l’utiliser de par son coût d’entrée réduit et la situation se transforma soudainement en une course à l’armement afin de savoir qui pourrait maîtriser en premier le pouvoir de cette plateforme pour des machines de divertissement.

En plus des ordinateurs personnels proposant des lecteurs de CD-ROM comme une alternative à la disquette, NEC a été le premier à offrir un lecteur de CD comme add-on à sa console PC Engine (appelée TurboGrafx-16 aux USA) dès 1988 au Japon. Le co-créateur du CD, Philips, lance la première console avec lecteur CD [NdR : en standard] avec la CD-i et, alors que la guerre entre Nintendo et SEGA bat son plein, chacun d’eux travaille sur sa propre extension CD. En effet, Nintendo signe un partenariat avec Sony puis Philips pour sa Super Nintendo (les deux partenariats tomberont à l’eau et l’échec avec Sony mènera à la création de la PlayStation). Quant à SEGA, 1992 vit la sortie du Mega CD pour sa Mega Drive. De même, la dernière tentative d’Atari de lancer une console [NdT : du moins jusqu’à récemment] avec la Jaguar se vit elle aussi, même si assez tardivement, dotée d’un lecteur de CD comme accessoire en 1995, plusieurs mois après la sortie de la Saturn et deux semaines après celle de la PlayStation aux États-Unis. Enfin, en cette année célébrant son trentième anniversaire, 1993 fut l’année de la sortie de la 3DO, une plateforme de jeu standardisée dont la licence a été octroyée à des constructeurs comme Panasonic, Goldstar ou Sanyo pour qu’ils fabriquent leur propre version de cette plateforme de divertissement et de jeu. Et c’est aussi durant cette période que sortit Myst sur PC CD-ROM, faisant en sorte que de nombreux joueurs s’intéresse au jeu vidéo au format CD sur PC et à cette technologie en général.

Du CD-ROM sur toutes les consoles

Même si le marché des consoles devenait de plus en plus gros, il y avait toujours beaucoup d’attrait à utiliser ces dernières dans des bornes d’arcade. La 3DO Company, par exemple, fut l’une des sociétés à saisir cette opportunité « arcadesque » d’autant plus qu’elle avait déjà à son actif un certain nombre de contrats de licences. L’étape suivante pour 3DO fut d’octroyer à ALG une licence pour qu’ils utilisent la 3DO de Panasonic dans leurs machines comme alternative à leur problématique LaserDisc. C’est ainsi qu’en même temps que la suite de Mad Dog, ALG se mit à sortir de plus en plus de titres basés sur CD-ROM, touchant à nouveau le jackpot avec Crime Patrol en 1993. C’était un jeu de tir sur un thème policier avec des vrais acteurs dont le style rappelait les origine de la société dans l’entraînement au tir.

Flyer de Crime Patrol

Mais en ce qui concerne les plans pour 3DO dans l’arcade, en dehors d’ALG, les résultats ne répondirent pas à leurs aspirations. Panasonic développa bien une console M2 comme un successeur à la 3DO mais elle ne fut jamais commercialisée en tant que système de jeu pour le grand public. Cependant, Konami obtint une licence pour du hardware M2 en 1997 qui fut utilisé pour cinq bornes d’arcade. Mais les capacités CD de ce matériel ne furent exploitées qu’en tant que médium de stockage pour les graphismes des jeux.

Et en ce qui concerne le déploiement du CD-ROM en arcade après 1993, ALG développera plusieurs suites de ses célèbres jeux à pistolet optique, avec un total de neuf jeux-film de tir – dont beaucoup seront portés sur consoles. L’un d’entre eux fut Fast Draw Showdown (1994) qui deviendra l’un des jeux les plus populaires de cette année. Malgré les succès en arcade, ALG se retira complètement de ce marché en 1995 pour se concentrer sur la création de jeux pour consoles et PC, jusqu’à leur fermeture en 2018, date à laquelle leurs droits furent vendus. Fast Draw réussit tout de même à avoir une deuxième vie, à nouveau distribué par Global VR en 2002 mais cette fois, il tournait entièrement sur disque dur.

Flyer de Fast Draw Showdown

Pour ceux que cela intéresse de voir la sélection complète des titres ALG, n’hésitez pas à regarder cette vidéo :

Durant l’année 1993, il y eut une dernière implémentation de la technologie du LaserDisc qui offrit quelque chose d’unique dans son implémentation. Initialement conçue comme une attraction du parc Wonder Egg, Namco a créé une version réduite de leur concept et la lança en tant que Galaxian 3 – Theater 6 [NdT : voir à ce sujet ce reportage TV français]. La structure géante abritait un écran de 5,5 m de large devant lequel jusqu’à six joueurs pouvaient tirer dessus. Ce système contenait deux projecteurs, chacun relié à un lecteur de LaserDisc (des Pioneer LD-V8000 synchronisés). Le jeu (Project Dragoon) était essentiellement une évolution des jeux en FMV précédents – avec le film des arrière-plans de batailles spatiales en images de synthèse précalculées diffusé sur l’écran, sur lequel sont superposés les ennemis, les tirs laser des joueurs et les explosions en 3D temps réel. En fait, il s’agissait d’une version agrandie et en multi-joueurs de Starblade, également un jeu d’arcade de Namco. Et toute cette approche est sans conteste empruntée au susmentionné AS-1 de SEGA mais avec des petits plus dans la présentation et l’installation.

Cette approche innovante des limitations des graphismes en 3D de l’époque fonctionna bien et créa un jeu compétitif qui se révéla très populaire. Cependant, la machine était incroyablement grande, au point d’être appelée « le plus grand jeu vidéo du monde » mais également incroyablement chère (coûtant quelques 150 000$ en 1993). À cause de ces contraintes logistique et financière, Galaxian 3 était surtout déployé dans les endroits phares comme les parc d’attractions, hors de portée de la plupart des salles d’arcade [NdT : il n’y avait que deux exemplaires en France, à Paris et à Lyon]. Malgré cela, une suite (Attack of the Zolgear) fut mise en chantier et sortit en 1994 pour la même plateforme. Cette expérience unique marqua à la fois le point culminant de la technologie mais aussi le dernier produit de divertissement à base de LaserDisc pour le grand public.

Flyer de Project Dragoon sur Galaxian 3 Theater 6

Note : Pour plus de clarté, signalons que si l’industrie occidentale du divertissement se désintéresse de cette technologie, gardons à l’esprit qu’au Japon, le LaserDisc eut une deuxième vie dans le business du karaoke (parfois appelé « LaserKaraoke »). Des entreprises comme Pioneer, SEGA ou Taito continuèrent à vendre des installations de karaoke et de jukebox, beaucoup d’entre elles utilisant un LaserDisc, jusqu’au milieu des années 2000, pour les bars et les restaurants.

Épousant cette nouvelle technologie, beaucoup d’autres machines de jeu se mirent à utiliser le CD–ROM pour fournir à leurs jeux l’espace de stockage nécessaire. La flexibilité de ce format a démontré son utilité. Et avec son plus grand espace de stockage et ses performances, le basculement depuis les ROMs sur une carte JAMMA vers un ordinateur dédié avec un disque dur était inévitable. Car toutes les promesses faites par les jeux en live action, nombre d’entre eux s’affublant du mot à la mode « multimédia » pour provoquer l’engouement, avaient cédé leur place aux graphismes en polygones texturés en 1995. Et même si c’est dans les bornes d’arcade que ce style graphique avait débuté, c’est la console CD de Sony, la PlayStation, qui allait dominer la scène du gaming maintenant. Certes, des jeux en FMV allaient réussir à trouver leur chemin vers cette console, mais ce ne sont pas eux qui permirent de booster les ventes.

Flyer du système NAOMI de SEGA

Et les promesses des lecteurs de CD pour l’arcade furent de courte durée même si ce deuxième effondrement d’une technologie basée sur des disques optiques fut moins grave que le premier. Avec la migration du matériel d’arcade vers des disques durs, les capacités des disques optiques furent supplantées par ces derniers à mesure qu’ils augmentaient leur capacité, passant des Mégaoctets aux Gigaoctets. Cela dit, l’année 1998 vit une dernière tentative d’un standard de disque optique dans le monde de l’arcade avec le GD-ROM (Gigabyte Disc Read-Only Memory) de SEGA. Ce format propriétaire, développé en partenariat avec Yamaha, fut créé pour être compatible avec leur nouvelle console, la Dreamcast, et une nouvelle carte d’arcade appelée NAOMI. Cette plateforme de stockage numérique offrait des fonctionnalités plus avancées que le CD mais promettait également une grande protection contre le piratage, problème symptomatique du CD à cette époque (encore une promesse du laser qui ne fit pas long feu) et il était simple de changer de jeu. Mais les signes avant-coureurs étaient déjà là pour ces systèmes gangrénés par le piratage et les problèmes mécaniques. Et le dernier jeu au format GD-ROM fut lancé en 2006 sur NAOMI 2. Le sort des HD-DVD dans des bornes d’arcade de SEGA à base de PC fut scellé encore plus rapidement après ça.

En conclusion, nous pouvons noter que l’industrie du divertissement vidéoludique est passée des puces et des ROMs aux mémoires à bulles, LaserDiscs, CD-ROMs, DVD, disques durs puis aux SSD. Et dans la prochaine décennie, beaucoup pensent que le stockage dans le cloud et les réseaux décentralisés vont redéfinir le futur des technologies du divertissement. Il est intéressant de souligner la nature cyclique des innovations dans cette industrie, de 1973 à 1983 puis 1993. Comme ils l’ont fait avec le LaserDisc puis le GD-ROM, est-ce que SEGA pourrait être l’un des leaders de la prochaine révolution grâce, par exemple, à leurs plans pour le « fog gaming » et leur soi-disant « SuperGame » – ou bien une autre révolution technologique prendra la tête de cette course à l’innovation ?

Un grand merci au site web Dragon’s Lair Project d’avoir fourni des informations additionnelles pour cet article.

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