SHINOBI: ART OF VENGEANCE
Windows, Xbox, PlayStation, Switch
Catégorie : action/plateforme
Joueurs : 1
Développeur : Lizardcube
Éditeur : SEGA
Date de sortie : 29/08/2025
Prix : 29,99 €
Site Officiel : https://www.sega.com/fr/shinobi/shinobi-art-of-vengeance
(testé sur Xbox Series S, jeu fourni par l’éditeur)
Très attendu après la réussite inespérée de Streets of Rage 4 (2020), Shinobi: Art of Vengeance a toutefois refroidi pas mal de joueurs dont l’auteur de ces lignes à cause de sa démo, et pas uniquement parce que la version Switch 2 n’était pas encore optimisée et affichait des graphismes horriblement granuleux… Le titre de Lizardcube est en effet déboussolant pour un fan de la série dont le dernier épisode remonte il faut dire à loin. Tous les boutons des manettes modernes servent, bien qu’ils ne soient heureusement pas tous utilisés dès le début (en particulier dans la version finale), mais il y a d’emblée deux boutons d’attaque et donc des combos, un double saut (qui ne nécessite heureusement pas le timing exigeant des jeux Mega Drive), une touche pour la roulade et le dash aérien, une autre pour les kunais (désormais limités et au départ bien peu nombreux), et deux types de magies différentes (Ninpô et Ninjutsu). On a surtout été initialement perturbé par « l’exécution » qui ressemble à un troisième type de sort éliminant tous les ennemis à l’écran la première fois qu’elle est montrée, alors qu’elle sert en réalité à achever les ennemis (boss compris), ce qui permet notamment parfois de se régénérer (un peu) en plein combat. Cela dit, les ennemis mourront bien souvent avant qu’on ne puisse la placer et elle nous téléportera parfois au-dessus du vide !
Mais surtout, Shinobi: Art of Vengeance est (presque) un Metroid–like ; les niveaux ne sont pas interconnectés mais on aura parfois le choix entre plusieurs et on pourra surtout, même si c’est toutefois optionnel, les revisiter pour accéder à des zones précédemment inaccessibles. Il y a en effet des compétences à débloquer (un grappin, des griffes, etc.), des amulettes à équiper (une offensive et une défensive) pour se faciliter la vie, et des reliques pour débloquer plus d’articles, principalement des attaques, dans les boutiques contre l’argent amassé. À cela s’ajoutent des défis de combat appelés Escouades d’élite qui donnent des récompenses quand on réussit tous ceux d’un niveau, des séquences de plateforme ardues qui mènent à des coffres, mais aussi les brèches de l’Ankou qui se débloquent après la deuxième zone, et qui sont là aussi des challenges de différents types, mais en général encore plus difficiles… On est donc très loin d’un stalk and gun comme le Shinobi (1987) inaugural malgré quelques clins d’œil comme certains boss ou les enfants otages dans Neo City, et même si cela ressemble plus aux épisodes Mega Drive (avec pas mal de scènes faisant référence à Shinobi III: Return of the Ninja Master (1993) en particulier), c’est quand même bien plus orienté combat. Il faudra notamment maitriser la ruée par exemple, qui permet de « traverser » un ennemi (en particulier après une attaque) quand un Shinobi X (1995, Saturn) était plutôt basé sur la parade – seule une magie permet ici de contrer un coup, et uniquement avec le bon timing.

Heureusement, le vrai jeu est nettement moins intimidant que la démo, qui donne par exemple bien plus tôt accès aux boutiques d’emblée très achalandées, à certaines compétences comme le grappin et les griffes et donc à certaines zones facultatives et ardues, sans doute pour montrer l’étendue de ce qu’offre l’aventure au risque de nous perdre. Le jeu complet est bien plus progressif dans sa manière de présenter les techniques et, même si l’on découvrira pas mal de choses par soi-même, le gameplay a le mérite d’être assez instinctif, hormis peut-être la course contre les murs. Celle-ci est indéniablement « ninja » dans l’esprit mais clairement moins habituelle et donc un peu moins intuitive qu’un classique rebond mural, également présent. Néanmoins, Joe Musashi s’agrippe à peu près partout automatiquement, et même parfois un peu trop ; il est par exemple difficile de se laisser tomber rapidement au milieu d’un tunnel étroit sans glisser (horriblement) lentement sur les murs… De manière générale, c’est le genre de jeu où l’on peut faire des trucs assez chouettes sans l’avoir trop calculé, mais aussi s’énerver bêtement avec le grappin en particulier dont on ne choisit pas librement la direction dans laquelle il nous propulse. On y reviendra mais un peu comme pour les ennemis, c’est enfantin quand il n’y a qu’un seul point d’attache, mais ça devient parfois inutilement fastidieux quand il y en a plusieurs trop près les uns des autres.
Notons aussi la présence de niveaux de course (sur un loup ou sur un surf) façon Shinobi III (1993, Mega Drive). Ceux-ci sont en réalité facultatifs car on peut passer à la suite si l’on meurt avant la fin, mais ils permettent de débloquer des améliorations si on en voit le bout. Hélas, s’ils sont sympas visuellement, ils ne sont pas très funs à jouer du fait de l’inertie de votre monture, et ressemblent plus à des épreuves de rythme qu’il faut connaître par cœur. Pour ce qui est des niveaux classiques, on pourra hélas trouver qu’ils sont trop longs (ce qui en plus atténue la qualité des décors qui se répètent malgré tout) et le level design un peu trop scolaire à base d’interrupteurs – des passages de Neo City sont caricaturaux en la matière. Certains sont en plus assez labyrinthiques, même si la carte emploie une teinte violette pour indiquer les passages facultatifs. Le jeu aime sinon beaucoup les séquences en scrolling forcé où il faut échapper à un danger comme dans un runner, et c’est parfois un peu abscons – la chute de pierres façon Shinobi III là encore, qu’on finit par passer à l’arrache si on a assez de santé. En outre, l’un des inconvénients d’un gameplay basé sur les combos est qu’on ne peut pas les « annuler », ce qui peut être agaçant car on peut se prendre un tir alors qu’on est en plein enchaînement et qu’il est donc impossible de se baisser – et ce, d’autant que certaines attaques sont imparables. Et l’on aimerait aussi pouvoir renvoyer certaines attaques ; ah, les lanceurs de hache qui arrivent toujours à intercepter notre trajectoire…

Il faut dire aussi que la difficulté est plutôt relevée dans le réglage de base, même si l’on peut la doser de manière précise dans les paramètres d’accessibilité. On a toutefois fait l’effort de ne pas la toucher pour ce test, quitte à multiplier les morts… Certes, on a globalement tendance à s’améliorer à chaque tentative face à un passage de plateforme ou contre un boss mais, en particulier lors des combats, c’est le genre de jeu où la difficulté est un peu « aléatoire ». Comme on l’évoquait plus haut, la plupart des ennemis sont très gérables seuls mais peuvent se montrer insupportables combinés à d’autres, surtout s’ils ont des attaques imparables. C’est assez flagrant contre certaines Escouades d’élite ou le boss Chiyo quand elle se multiplie en trois ou quatre exemplaires – mais je connais quelqu’un qui l’a battue du premier coup, preuve que c’est aléatoire. En parlant des boss, ils peuvent aussi rapidement se montrer ardus avec de longues jauges d’énergie même si, là encore, la chance jouera un rôle important sur les attaques utilisées par ces ennemis. Et si une Ninjutsu bien placée pourra les achever (ou nous régénérer), encore faut-il remplir sa jauge – ce qui nécessite paradoxalement de se faire toucher. Celle-ci n’est heureusement pas réinitialisée à chaque essai mais d’un autre côté, si on se rate après l’avoir utilisée (pour rien, donc), cela signifie qu’il faudra refaire une demi-douzaine de tentatives avant de la remplir de nouveau… Alors certes, il y a un objet qui permet de le faire plus rapidement, mais il est offert par le boss de l’avant-dernier niveau.
Cependant, si j’insiste volontairement sur les aspects frustrants forcément mémorables pour de mauvaises raisons, il faut avouer que le système de combat peut se montrer jubilatoire, encore une fois lorsque l’on fait face à peu d’ennemis à la fois. Les combos sont assez bien pensés et, hormis l’impossibilité d’annuler un enchaînement comme évoqué plus haut, le fait que les affrontements soient un peu aléatoires signifie aussi qu’ils se dérouleront parfois à merveille, tout s’enchaînant à la perfection… Et il en est donc de même pour l’aspect plateforme, puisque l’on pourra parfois réussir des prouesses dont on ne se pensait pas capable, ou au contraire se rétamer lamentablement. Tant qu’on est dans les reproches, contrairement à un Metroid–like habituel, on ne peut pas se régénérer en revenant au dernier checkpoint même si l’on peut « gruger » le système en se téléportant à un autre avant de revenir à celui-ci ! Un choix de design étrange, donc, et l’on se demande d’ailleurs pourquoi il y a souvent des bonus de vie juste avant ou après les checkpoints (mais peut-être ceux-ci ne régénèrent pas dans certains niveaux de difficulté)… Heureusement, quand on meurt, on réapparaît à la dernière stèle mais tout ce que l’on a ramassé ou activé demeure, et seuls les ennemis (et bonus de base) réapparaissent. Et lorsque l’on tombe dans un piège, on ne retourne pas au dernier point de contrôle – tant mieux car ils sont parfois éloignés ! – mais on réapparaît souvent juste au bord du gouffre, ou parfois hélas au début de la séquence de plateforme.

Sur le plan visuel, c’est souvent somptueux, certes, même si l’on fait partie de ceux qui préfèrent le pixelart tout aussi impressionnant d’un NINJA GAIDEN: Ragebound. Par ailleurs, si les décors sont pour la plupart irréprochables, certains boss ont littéralement un côté « brouillon ». Et puis ce style visuel très bande dessinée manque parfois de lisibilité. Le contour des plateformes n’est pas toujours très clair, il y a des parois dont on ne sait si on peut les traverser ou non (les quais en perspective du port par exemple), et le jeu regorge de petits détails, comme des flammes à l’avant ou à l’arrière-plan, dont on peut croire qu’elles peuvent nous blesser comme les bûchers par exemple. Et quitte à faire notre pointilleux, on aurait bien aimé une police d’écriture un peu moins générique dans les menus. Par ailleurs, même si la série est parfois allée très loin en matière d’univers en invoquant Spider-Man ou Godzilla, la présence de yokais nous a paru assez incongrue et l’aventure vire rapidement dans le fantastique, dans un registre qui fait ironiquement plus Ninja Gaiden que Shinobi à notre avis. Par ailleurs, les cinématiques sont étonnamment verbeuses pour un jeu old school, et l’on avouera qu’on n’a pas lu grand-chose… En revanche, rien à dire sur les musiques même si l’on ignore lesquelles sont de Tee Lopes (Sonic Mania, Shredder’s Revenge, Metal Slug Tactics) ou de Yūzō Koshiro, mais c’est au fond bon signe qu’elles ne jurent pas les unes avec les autres.
Verdict : Si c’est indéniablement un très bon jeu, Shinobi: Art of Vengeance ne séduira peut-être pas tous les fans de la première heure, et peut se montrer hélas aussi frustrant que jubilatoire.
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